Le bienheureux Henri Planchat, un modèle actuel pour tous les prêtres

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Après la béatification du Père Planchat, martyr de la foi, le 22 avril 2023 à Paris, je partage ici un texte inédit que j’ai écrit au sujet de ce prêtre du peuple. Il s’agit du chapitre 6 du livre que je lui ai consacré, dans sa version initiale non épurée. Il est intéressant d’y noter par exemple que l’encyclique sociale de Léon XIII, Rerum novarum, fondement de la doctrine sociale de l’Eglise, prend racine dans l’expérience solidaire vécue par Henri Planchat et ses compagnons à Paris. Pour plus d’informations, vous pouvez lire la biographie officielle du bienhereux que j’ai signée, aux éditions Nouvelle Cité :  https://www.nouvellecite.fr/product/128486/avec-le-c-ur-et-le-regard-du-pere-henri-planchat/

 

La charité pour idéal

L’inscription sculptée sur la pierre tombale du Père Planchat le décrit comme un « homme d’une admirable charité envers les pauvres », « modèle de parfaite humilité », « livré tout entier pendant plus de vingt ans au service des indigents ». Une citation inspirée de versets bibliques, inscrite en bas de cette pierre, fait résonner le cri de Dieu lui-même : « Mon peuple que t’ai-je fait… Moi je t’ai nourri de la manne dans le désert ! Toi, tu m’as souffleté… tu m’as flagellé et tu m’as livré ! ».

Si le prêtre catholique est un autre Christ, son existence ne peut que continuer le mystère de la Rédemption, par l’annonce libératrice de l’Evangile aux pauvres, à travers une forme d’abaissement pour rejoindre les plus petits – une « kénose » – et l’offrande de soi-même, dans un sacrifice d’amour, comme le grain tombé en terre qui promet la moisson. Le Père Planchat est en tout cela un modèle sacerdotal très actuel, autant pour le prêtre diocésain – car il fut formé et ordonné comme tel –  que pour le prêtre appartenant à une famille religieuse, puisqu’il adopta les conseils évangéliques exprimés par la trilogie des vœux de chasteté, pauvreté et obéissance. Longtemps d’ailleurs il resta « l’abbé » Planchat, selon le titre donné aux prêtres diocésains, dits séculiers, devenant progressivement pour les gens « le Père » Planchat, comme sont appelés les prêtres religieux dits réguliers, parce qu’ils suivent une règle de vie communautaire. Toujours est-il qu’Henri Planchat mérite vraiment le titre de Père, qu’il n’a pas porté de façon formelle mais qu’il a gagné sur le terrain, par sa manière d’être à tous et son comportement paternel, plein de miséricorde.

Comment peut-il inspirer le prêtre d’aujourd’hui, immergé au cœur d’une société qui semble si éloignée de celle du XIXème siècle ? À bien y regarder, la révolution industrielle libérale, avec ses lois darwiniennes de performance et de rendement, s’est propagée jusqu’à nous avec la domination du « capitalisme digital » et le projet néolibéral basé sur la compétition sociale, qui asservit l’humanité pour la rendre compatible avec la concurrence globale… Rien n’a vraiment changé et des pauvres nous en avons toujours, à l’échelon universel.

De plus, dans la « Positio » – ce document officiel soutenant la cause de béatification du serviteur de Dieu – le Postulateur général des Religieux de St-Vincent de Paul fait remarquer que, d’un certain point de vue, le contexte dans lequel a vécu Henri Planchat n’était pas si différent du nôtre, notamment en raison de la haine antireligieuse causée par les incohérences de prêtres et religieux embourgeoisés, pris dans les filets de la « mondanité », ayant abusé de leur pouvoir et trahi la fidélité au Christ. « La cause de béatification du Père Planchat, loin d’être un événement du passé, est vraiment pertinente. Il fut un témoin exemplaire dont l’Église peut être fière ; de ceux que l’on peut présenter comme un religieux dévoué, un vrai pasteur au service des pauvres, des jeunes et des familles ».

Ce constat autour de la cause de béatification du serviteur de Dieu rejoint directement la préoccupation du Pape François, qui s’adresse régulièrement aux membres du clergé en leur demandant de refléter la réalité d’une Eglise pauvre pour les pauvres, comme il l’a dit par exemple aux nouveaux prêtres, dans la basilique Saint-Pierre, à Rome, le 25 avril 2020 : « S’il vous plaît, éloignez-vous de l’argent. Soyez des pauvres qui aiment les pauvres ». « Chers frères prêtres, je vous invite à élargir vos horizons, à rêver d’une Eglise servante, d’un monde plus fraternel et solidaire », ajoutait-il devant des prêtres français le 7 juin suivant, les exhortant à être des pasteurs avec « l’odeur de leurs brebis », citant une de ses premières homélies, prononcée le 28 mars 2013, quelques jours après son élection comme successeur de Pierre.

Ce choix pastoral de mettre les pauvres « au centre du cheminement de l’Eglise », qui commença à poindre autour de 1830 à travers l’engagement de laïcs et de religieux catholiques, est aujourd’hui le grand mérite authentique, tangible incontestable, du pontificat de Jorge Bergoglio. Enraciné dans une « théologie du peuple » avant tout mystique, ce retour à l’Evangile est par anticipation illustré dans la vie du Père Planchat, un siècle avant les appels de saint Paul VI en faveur d’une « Eglise servante et pauvre » – dans l’esprit du Concile Vatican II – long combat mené depuis l’éloge à Dame Pauvreté de François d’Assise et la Divine Comédie de Dante, pour libérer l’Eglise catholique de ses désastreuses compromissions avec les adeptes de Mammon, le dieu-argent.

« Les pauvres sont le sacrement du Christ, ils représentent sa personne et nous renvoient à lui », insiste d’ailleurs le Pape François dans son message pour la Vème Journée mondiale des pauvres. Il demande que l’on aille rencontrer les pauvres où ils se trouvent : « Nous ne pouvons pas attendre qu’ils frappent à notre porte, il est urgent que nous les atteignons chez eux, dans les hôpitaux et les résidences de soins, dans les rues et les coins sombres où ils se cachent parfois, dans les centres de refuge et d’accueil ». Le Pape, qui décrit indirectement là des œuvres de Miséricorde que le Père Planchat a mises en pratique à Paris, nous rappelle que suivre Jésus implique de ne plus considérer les pauvres « comme des personnes séparées », « comme une catégorie qui demande un service de bienfaisance particulier », mais qu’il s’agit avec eux de « relever le défi du partage et de la solidarité », ce qui suppose « un changement de mentalité ».

Henri Planchat témoigne que ce changement de mentalité ne se réalise pas en renversant les structures comme la Commune a voulu le faire, mais à travers des cœurs qui se laissent remplir et illuminer par les dons de l’Esprit Saint, parce que, comme l’explique le Pape François, « ce que l’Esprit suscite n’est pas un débordement d’activisme, mais avant tout une attention à l’autre » (Evangelii Gaudium, n.198). L’humilité est la condition de cette écoute de l’Esprit – créateur et créatif – qui suscite une attention aimante, le désir du bien de l’autre, qui fait toutes choses nouvelles en nous ; c’est ainsi seulement que le changement peut advenir, du bas vers le haut, pour renouveler la face de la Terre, comme le Pape François l’indique prophétiquement dans son encyclique Laudato si’.

Afin de se rendre capable d’une charité à ce point révolutionnaire, Henri Planchat cherche tout au long de sa vie à affermir en lui la vertu à son avis fondamentale, la « sainte humilité », résolu à « n’apporter aucun obstacle sérieux aux desseins de la Providence » et à rester « sous l’œil de Dieu ». « Si l’orgueil est la racine de tous les maux, l’humilité le sera de tous les biens », considère-t-il dans ses notes spirituelles de jeunesse.Les yeux des hommes ou des femmes ne lui importent pas. « Que la conviction de notre dépendance nous conduise à l’humilité, Marie pouvait se croire quelque chose, le saint usage qu’elle avait toujours fait de sa volonté lui en donnait le droit ; nous, reconnaissons au moins que nous ne sommes rien devant Dieu ; « Comme un néant devant toi ». Après cela, n’allons pas vouloir paraître quelque chose aux yeux aveugles des hommes, occuper quelque place dans notre propre estime, Dieu seul est digne d’estime et de louange », écrit-il à l’âge de vingt ans, quatre ans avant d’entrer au séminaire.

Etudiant en droit, durant l’été 1844, désireux de « correspondre à la grâce » il note vouloir retracer dans son âme les vertus de saint Vincent de Paul, le pâtre des Landes. Le récit de la rencontre de Vincent avec François de Sales, l’évêque de Genève, à Paris, en 1618, le touche beaucoup. « Que tu es bon, mon Dieu, puisque François de Sales, ta créature, est aussi douce et aimable », s’était exclamé Vincent, alors en chemin de conversion, choisissant – à près de 40 ans – de renoncer définitivement à l’orgueil et d’emprunter la voie de l’humilité, se faisant apôtre de la charité et de la douceur.

« Or, saint Vincent de Paul fut humble, je dois l’être », souligne Henri. « L’humilité, c’est la bonté première et essentielle du christianisme. Qui ne posséda jamais à un plus haut degré que saint Vincent de Paul cette simplicité évangélique à laquelle est promis le royaume des cieux, et sans laquelle nul ne peut en espérer l’entrée ?Au milieu des grandeurs, des affaires épineuses, il chercha toujours par la voie la plus droite les moyens qu’il devait prendre. Toujours il conserva la candeur, l’ingénuité d’un enfant. Je serai simple de cette simplicité qui rend l’âme libre, calme et la laisse bien plus éclairée, bien plus ferme dans les déterminations. Je serai simple avec Dieu, ne cherchant pas à me dissimuler les fautes ou les mauvaises dispositions qu’il me connaît.. ».

Dans ses notes spirituelles, il écrit plus tard encore à propos de cette voie royale vers la charité qu’est l’humilité : « Ne nous décourageons pas, c’est toute la vie, c’est jusqu’au dernier soupir qu’il faut combattre… Quelque difficile qu’il soit d’atteindre ce but, proposons-nous chaque matin une journée parfaite, nous arriverons au moins par là à rendre nos jours moins imparfaits ».  « Si quelque plante parasite, quelque mauvaise herbe d’orgueil… ravit à notre âme l’ombre salutaire de l’arbre de vie, arrachons cette plante, déracinons cette herbe. Nous sommes un conquérant, le champ de nos conquêtes est notre âme », précise le futur prêtre, voulant diminuer le nombre de ses manquements et augmenter en lui l’amour de Dieu, sûr que « ses flammes consumeront tout ce qui y reste de naturel et de mauvais ».

Le chapitre 1er des constitutions de la Congrégation des Religieux de St-Vincent de Paul, met en lumière cette priorité de « l’œuvre intérieure » à laquelle le Père Planchat s’est appliqué, déclarant en introduction, avant même l’article 1 de ces statuts : « Que pourrions-nous produire de bon si nous n’avons que notre misère et comment répandrions-nous Jésus-Christ parmi nos frères s’il n’est pas en nous, s’il n’a pas transformé en lui nos esprits, nos cœurs et nos volontés, notre être tout entier ».

Dès le début de la fondation de sa famille religieuse, Jean-Léon Le Prevost traçait ce cap essentiel, à ses premiers fils, dans une de ses plus belles lettres : « C’est la charité qui suscite tout autour de nous ; c’est elle qui réveille les âmes, les pousse et les rallie ; c’est elle aussi qui nous emporte et nous enveloppe dans son action ; la charité ne faillit pas et ne reste pas en chemin, une fois allumée il faut qu’elle s’étende, brille et porte au loin sa chaleur… la charité, comme la flamme, consume et purifie ; par elle, nous serons pénétrés, vivifiés, par elle nous serons transfigurés ! C’est la charité qui nous pousse et nous presse, nous sommes mus par elle ; par elle si ardente, si puissante ; par elle force, volonté, amour, amour infini, amour de Dieu ! » (26 août 1847).

Le prêtre qui prend modèle sur Henri Planchat a donc la charité pour idéal, il choisit d’être auprès des plus fragiles et sans défense et ne cherche pas de médaille en récompense. Son style est celui de l’amour gratuit, celui d’une Eglise de la tendresse et de la proximité, loin de l’auto-référentialité ecclésiastique, avec une carte d’orientation : les Béatitudes (Mt 5, 3-12).Heureux les miséricordieux ! Heureux qui  accomplit toutes les œuvres de miséricorde, corporelles et spirituelles : donner à manger aux affamés, donner à boire à ceux qui ont soif, vêtir ceux qui sont nus, accueillir ceux les pèlerins ou les errants, assister les malades, visiter les prisonniers, ensevelir les morts ; conseiller ceux qui sont dans le doute, enseigner les ignorants, consoler les affligés, supporter patiemment les personnes ennuyeuses, prier Dieu pour les vivants et les morts…

Chaque prêtre, comme Henri Planchat, devrait pouvoir être une icône vivante de l’insurpassable hymne à la charité de saint Paul : « J’aurais beau parler toutes les langues des hommes et des anges, si je n’ai pas la charité, s’il me manque l’amour, je ne suis qu’un cuivre qui résonne, une cymbale retentissante. J’aurais beau être prophète, avoir toute la science des mystères et toute la connaissance de Dieu, j’aurais beau avoir toute la foi jusqu’à transporter les montagnes, s’il me manque l’amour, je ne suis rien. J’aurais beau distribuer toute ma fortune aux affamés, j’aurais beau me faire brûler vif, s’il me manque l’amour, cela ne me sert à rien » (1 Co 13, 1-13).

Cet hymne à l’amour, le Père Planchat l’incarne et – appliquant à sa personne les paroles de cette première lettre aux Corinthiens, en remplaçant le mot amour par son prénom – nous pouvons dire aussi : « Henri prend patience ; Henri rend service ; Henri ne jalouse pas ; il se vante pas, il ne se gonfle pas d’orgueil ; il ne fait rien d’inconvenant ; il ne cherche pas son intérêt ; il ne s’emporte pas ; il n’entretient pas de rancune ; il ne se réjouit pas de ce qui est injuste, mais il trouve sa joie dans ce qui est vrai ; il supporte tout, il fait confiance en tout, il espère tout, il endure tout… ». Le Père Planchat manifeste vraiment par sa vie et dans sa mort même que « l’amour ne finira jamais ».

« La charité, quand nous la vivons à la manière du Christ, dans l’attention et la compassion à l’égard de chacun, est la plus haute expression de notre foi et de notre espérance » (Tweet du Pape François, été 2021).

Tisser sur la terre des relations trinitaires

À Paris, lors de l’enquête diocésaine du procès de la cause du Père Henri Planchat, entre 1897 et 1900, certains  témoignages donnés par ceux qui ont vécu avec le serviteur de Dieu font écho aux paroles de saint Paul parlant du Christ, « qui s’est fait pauvre, de riche qu’il était » (2 Co 8,9). Mgr Léon-Adolphe Amette par exemple, qui sera archevêque de Paris et cardinal au début du XXème siècle, dit avoir recueilli de la bouche du Supérieur du séminaire Saint-Sulpice un témoignage d’admiration en faveur de la charité d’Henri Planchat, « qui, nonobstant son éducation et le monde auquel il appartenait, s’était voué ainsi à quêter pour toutes ses bonnes œuvres ».

Ce mouvement de « kénose » – du mot grec qui signifie « vider » – fait que le Père Planchat s’abaisse, quittant ses attributs sociaux, son statut de fils de famille aisée, diplômé en droit, pour se faire tout à tous, suscitant en permanence des relations simples et fraternelles, avec les laïcs et comme avec les autres prêtres. Son attitude est digne de l’enseignement de saint Paul aux Philippiens : « Ayez en vous les mêmes sentiments qui sont dans le Christ Jésus : Lui, de condition divine, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’anéantit lui-même, prenant la condition de serviteur, et devenant semblable aux hommes. S’étant comporté comme un homme, il s’humilia plus encore, obéissant jusqu’à la mort, et la mort sur une croix » (Ph 2).

 Si au temps de saint Vincent de Paul, les religieux sans clôture n’étaient pas permis par Rome, ce qui ne l’empêcha pas de fonder audacieusement les Filles de la Charité, au temps du Père Planchat c’est la place des laïcs dans l’action évangélisatrice de l’Eglise qui n’est pas admise, alors que par la grâce de leur baptême ils sont prêtres, prophètes et rois… Le serviteur de Dieu, à peine ordonné prêtre, va aller vivre avec des laïcs et obéir à l’un d’eux, Jean-Léon Le Prevost. Il participe à leurs activités depuis cinq ans. Ce qu’il veut avant tout, comme frère-prêtre, c’est expérimenter dans l’Eglise des relations de famille, à l’image de ce qui se vit dans la Trinité.

Un an avant d’entrer au séminaire, en 1846, il écrivait de pages enflammées à ce sujet : « La Trinité est le fondement nécessaire de tous les dogmes chrétiens : tous les mystères que l’Eglise a successivement proposés à nos hommages se résument en celui-ci. Conservons donc le fruit de ces mystères en pensant fréquemment à la Sainte Trinité. Adorons ce Père qui nous a créés et par qui nous est donné tout ce que nous recevons, ce Fils qui nous a rachetés, ce Saint Esprit qui nous applique les mérites de la Rédemption. Tâchons de retenir en nous les salutaires impressions qu’ont dû y laisser les mystères de la Résurrection et de la Croix, de faire valoir les dons que le Saint Esprit a répandu dans nos âmes; ces dons de sagesse et d’intelligence qui nous ont fait comprendre et goûter les choses de Dieu, les dons de conseil et de force par lesquels nous voyons les moyens que nous devons choisir, et nous les employons courageusement ; ce don de crainte qui nous empêche d’oublier notre faiblesse et la grandeur imposante du souverain être ; enfin et surtout ce don de piété qui nous fait servir Dieu non point par crainte mais par amour. Dieu nous a tant aimés que d’employer à notre salut les trois divines personnes dans son être se compose, par la régénération du Calvaire, par l’effusion de l’Esprit sanctificateur, il nous a fait enfants du Père et cohéritiers de Jésus-Christ, pour tout dire en un mot, participants de la nature divine… ».

Sous l’influence manifeste de l’Esprit-Saint, il a fait ce choix de l’humble communauté des Frères de St-Vincent de Paul, tandis que peu d’ecclésiastiques comprennent alors le problème posé par la déchristianisation des masses ouvrières. Sa décision de consacrer sa vie au service du monde ouvrier provoque la décep­tion et les critiques des membres du clergé qui le fréquentent, mais lui ne désarme pas, désireux de témoigner du Dieu un et trine au coeur d’une population que l’Eglise, défigurée par le carriérisme clérical, n’a pas su rejoindre. Selon lui la vie communautaire des prêtres pourrait changer les choses, et en cela aussi c’est un visionnaire.

« Toujours j’ai été frappé tant des dangers de l’isolement où vivent la plupart des prêtres, que de la stérilité des réunions qui se bornent à la cohabitation sous le même toit, sans aboutir à cette charité fraternelle et à cette unité d’action si nécessaires aujourd’hui », écrit-il lors d’une retraite spirituelle. « En conséquence des pensées qui me sont venues souvent à ce sujet, de l’attrait que j’ai toujours ressenti et qui se fortifie en moi depuis mon entrée dans l’état ecclésiastique, je fais une ferme résolution de ne reculer devant aucun sacrifice, soit d’amour-propre, soit d’affections de famille, pour mettre à profit et même rechercher les occasions d’une vie vraiment et utilement commune ».

Sa très belle conviction est que « l’union des prêtres doit retracer l’image de l’unité des trois personnes divines dans l’adorable Trinité ».

 Dans son ministère d’apôtre des faubourgs, après avoir eu des problèmes avec le curé de Grenelle, jaloux de son succès, il fut très attentif à tisser au jour le jour des liens de confiance à Charonne, où le curé ne tarit pas d’éloges à son égard. Si la mixité sociale dans les quartiers, de règle depuis le Moyen Âge, a presque disparu en raison de l’individualisme bourgeois issu du détournement de la Révolution, le Père Planchat tisse sans cesse des liens pour rapprocher les classes sociales et réconcilier les contraires, dans un effort continu de médiation pour que tous soient un, selon le testament du Christ exprimé pendant le dernier repas avec ses apôtres (Jn 17, 21).

« Le digne curé de Charonne l’aimait avec vénération, le plaisantait agréablement de son zèle envahissant ; mais il était heureux comme ses confrères, de l’utile auxiliaire envoyé par la Providence », raconte un témoin. Quant au Père Benoît-Marie Langénieux – futur archevêque de Reims et cardinal – curé de l’immense paroisse Saint-Ambroise à l’époque, il lance au Père Planchat : « Oh mon bon Père, faites dans ma paroisse tout le bien que vous pourrez, car nous ne serons jamais assez pour cultiver des champs si vastes ! ». Cette paroisse compte alors soixante-quinze mille habitants, dont les deux-tiers sont des « indigents », et où tout est à créer. Marqué au coeur par l’exemple incandescent du Père Planchat, l’Abbé Langénieux inaugurera après la Commune le premier cercle catholique, fondé par le Frère Maurice Maignen avec le comte Albert de Mun, avant de devenir le « cardinal des ouvriers » et d’inspirer petit à petit à son ami le Pape Léon XIII sa grande encyclique sociale, Rerum Novarum, publiée en 1891, fruit des efforts persévérants d’Henri Planchat et de tant d’autres après lui.

En attendant, à Charonne, il y a parfois des malentendus, des reproches. Jamais le Père Planchat ne s’en plaint, et les contradictions ne sont connues que par d’autres. Pour lui, rapporte un témoin, «il attend une nouvelle occasion, et respectueusement, humblement, tente de nouveau le bien que son zèle lui fait entrevoir comme nécessaire. Il est actif aux œuvres du ministère avec humilité, ne perdant rien de l’esprit de piété, privilège unique de  son apostolat surnaturel ».

Au milieu des religieux, avec les prêtres, comme avec les gens, il réalise la grande loi de l’apôtre : « Nous, à plusieurs, nous ne formons qu’un seul  corps dans le Christ, étant, chacun pour sa part, membres les uns des autres » (Rm 12, 5)

Nous avons peu d’homélies de lui, car il prêche par l’exemple plus que la parole. Ne juge-ton pas l’arbre à ses fruits plus qu’à ses guirlandes? Il écrit beaucoup de lettre snourries de sa pratique vécue de l’Evangile, d’où il ressort notamment qu’il a des amitiés féminines, libres et discrètes, dans la dynamique d’Eglise-Famille qui est la sienne, où les laïcs ne sont pas des employés mais des partenaires, où les femmes spécialement ont toute leur place de coopératrices, comme dans la vie du Christ. Il sait s’entourer de collaboratrices à Sainte-Anne et il ouvre en grand les portes de son œuvre aux femmes. C’est un avant-gardiste. Alors que les patronages sont strictement réservés aux garçons, le Père Planchat anime un groupe de dames – les mères des enfants – qui collaborent avec lui. Cependant, à l’époque, tellement de choses se disent sur les prêtres et les femmes, tellement de calomnies… Les caricatures dans les journaux ne manquent pas et démolissent l’image de la vie sacerdotale, la décrivant comme immorale. Dans un tel contexte le Père Planchat, cultivant la vertu de prudence, est inattaquable.

Il accueille de nombreuses femmes venues se confesser à lui dans une œuvre qui en principe était consacrée aux hommes; il reçoit beaucoup de femmes aussi avec leurs fiancés, mariant deux couples par semaine durant près de vingt ans. Se préoccupant énormément du sort des jeunes filles et faisant en sorte de les diriger vers les patronages féminins, il a également des bienfaitrices, devenues ses amies, qui le soutiennent. Elise Payen en particulier, directrice du patronage féminin Notre-Dame du Bon Conseil de Grenelle, prend soin des jeunes ouvrières. Le Père Planchat en est l’aumônier.

D’autres noms sont indiqués dans ses lettres, des femmes qu’il sollicite et pour qui il a de la reconnaissance : Mme Baloche, Mme la comtesse Ferrand, Mme de Tonnac, Mme Delahaye, Mme Pinard, Mme Fournier… Au moment de son arrestation il a d’ailleurs rendez-vous avec deux dames, et ce sont elles qui prennent sa défense face aux persécuteurs comme l’illustre un célèbre tableau représentant son arrestation.

Une de ses chères amies dans les œuvres de charité est Mlle Erdeven, la fille d’un avocat membre du comité du patronage. Sa correspondance avec elle est fournie, souvent à propos de jeunes ouvrières parfois âgées d’une quinzaine d’années, qu’il a rencontrées dans les familles visitées, et qu’il lui demande de suivre, d’accompagner. Il donne beaucoup de détails dans les courriers qu’il lui adresse, comme en mai 1864, à propos d’Henriette, une jeune blanchisseuse travaillant depuis l’âge de douze ans, dont la mère est sourde et le père aveugle, qu’il voudrait encourager à faire sa confirmation. Il raconte la maladie de cette jeune fille, que le travail a littéralement « tuée », et comment elle a éprouvé un mieux inespéré après avoir reçu la communion de sa main, sur son lit de douleur. Son récit évoque indirectement pour nous la guérison de la fille de Jaïre, dans l’Evangile, et le Talitha koum, « Lève-toi », que le Christ continue d’adresser à toute personne épuisée (Mc 5, 21-43).

Sa plus belle lettre en prison le 19 mai 1871 quelques jours avant sa mort, c’est à Mlle Erdeven qu’il l’écrit, laissant supposer la profondeur de leur relation spirituelle. « Mademoiselle, je ne sais pas comment le temps s’est écoulé depuis mon incarcération du 6 avril, sans que j’aie songé à réclamer vos bonnes prières et celles des âmes pieuses que vous connaissez. Du reste le moment  le plus important pour cela est venu, puisque la Commune s’occupe tout juste, à cette heure, non de la libération, mais de l’exécution des prêtres… Hélas! je n’ai pu célébrer ni entendre une messe, ni me confesser depuis le Jeudi Saint. J’offre à Dieu de mon mieux cette souffrance, la plus grande de toutes… J’y joins, je ne dis  pas quelques prières spéciales, mais l’intention de plusieurs  de celles que j’ai mises dans mon règlement de prison, règlement plus ou moins bien suivi. Je ne puis guère charger davantage ma pauvre tête. Je n’oublie pas non plus vos bonnes œuvres… J’ai trois fois besoin de prières pour me tenir prêt à recevoir le coup de grâce qui peut venir, et sans avis préalable et sans confession; pour me maintenir dans l’amitié de Dieu par le seul secours direct de sa grâce; pour ne pas perdre par les lâchetés, hélas! trop fréquentes de ma misérable volonté, le mérite de cette croix bénite envoyée par Dieu, pour mon bien et pour celui de mes chères ouailles ».

Comme le regard plein de compassion amoureuse de Marie Madeleine sur le Christ en croix, la prière de cette amie laïque, discrètement si précieuse,  a sans doute porté intérieurement Henri Planchat, jusqu’au bout, dans la communion des saints, lui donnant la force de garder les yeux ouverts et tournés vers le Ciel, tandis que les coups mortels s’abattaient sur lui.

Favoriser pour tous l’accès aux sacrements, sources de transfiguration

« L’Eglise tombe en ruine à cause de la mauvaise vie des prêtres, ce sont eux qui la perdent et la détruisent », disait saint Vincent de Paul en son temps. Au XIXème, siècle, le Père Planchat est fortement impressionné lui aussi par l’état d’abandon spirituel dans lequel se trouvent les prêtres séculiers, par le manque de formation des laïcs, et par la pitoyable dévotion l’Eucharistie.

À l’exemple du Père Pierre-Julien Eymard, qui vient de fonder en 1856, à Paris, la Congrégation du Saint-Sacrement, il ne cesse de répan­dre parmi les fidèles et les jeunes gens confiés à ses soins la dévotion au Saint­-Sacrement et la pratique de la communion fréquente.  Si son expérience personnelle lui avait montré les bienfaits d’une telle conduite, elle faisait pourtant scandale parmi les prêtres imprégnés des idées jansénistes. Adeptes d’un Dieu sévère, avec leurs idées rigoristes, les jansénistes, disciples de l’évêque néérlandophone Jansénius, s’étaient opposés théologiquement à Rome au XVIIème  au XVIIème  siècle. Dans leurs dérives sectaires, ils s’appuyaient sur des évêques locaux, enclints au « gallicanisme », c’est-à-dire à une conception nationaliste de l’Eglise qui correspondra à la volonté révolutionnaire de contrôler politiquement le catholicisme en France pour mieux l’étouffer, tentative contre laquelle se battra toujours Henri Planchat, serviteur de Dieu au coeur universel qui n’a rien d’un idéologue. Si à son époque le clergé français est largement gagné aux idées gallicanes, les « utramontains» défendent la juridiction du Pape et le développement de son influence à travers un renforcement du pouvoir pontifical, gage de liberté par rapport aux petits intérêts étatiques nationaux.

Confronté à ces deux ecclésiologies, en novembre 1861, le Père Planchat confiait sa peine et ses anxiétés à Mgr Louis-Gaston de Ségur – fils de la célèbre comtesse de Ségur – jeune prélat aveugle très estimé à Rome qui malgré son handicap se consacrait à diverses œuvres, comme le patronage des jeunes apprentis. Par retour du courrier, celui-ci, s’appuyant sur le dynamisme missionnaire du Concile de Trente – qui au XVIème siècle réagit aux théories protestantes – lui répondit en ces termes : « Je crois, et même je suis sûr que nous n’avons pas le droit de limiter au mois, à la quinzaine, ni même à la semaine, les communions de nos pénitents ; c’est une affaire individuelle qui ne regarde que le confesseur et le pénitent, et aucun usage n’est légitime dès qu’il restreint la liberté de conscience en cette délicate matière. Croyez-moi, laissez un peu crier contre vous la fausse prudence, la prudence gallicane, saupou­drée de jansé­nisme, laquelle ne vient pas de l’esprit de Dieu. Fort de votre obéis­sance aux direc­tives de l’Église, demeurez en paix et conduisez en toute assurance, prudence, simplicité, douceur et fermeté, votre petite barque spirituelle. Je fais comme vous et bien plus que vous, et je suis assuré de bien faire, parce que je ne suis pas mes propres idées, mais celles de l’Église Romaine, Mère et Maîtresse de la vraie pié­té ».

Tous les témoins interrogés rapportent que le Père Planchat considère l’Eucharistie non comme un prix pour les saints mais comme le pain des pauvres et des marcheurs, de ceux qui sont en chemin vers le Royaume de Dieu et ont besoin de refaire leurs forces. Son confrère Henri Sadron, religieux de St-Vincent de Paul, raconte qu’il « poussait beaucoup à la communion les enfants dont il était le confesseur ; et aux observations que nous lui faisions en quelques circonstances, il répondait que la communion ne devait pas être considérée uniquement comme une récompense, mais aussi comme une nourriture et un remède ». Il est en cela très actuel, en syntonie avec le Pape François qui répète à qui veut l’entendre à propos de la logique de l’Eucharistie : « Recevons Jésus qui nous aime et prend soin de nos fragilités pour aimer les autres et les aider dans leurs fragilités » (Angélus du 8 juin 2021, en la solennité du Corpus Domini).

Lors d’une exhortation à la première communion d’enfants, dans la chapelle de l’évêque d’Angers, le Père Planchat cite la parabole du festin nuptial (Mt 22,4),  déclarant aux communiants que « c’est bien le moment des noces de l’Agneau, de cet Agneau si doux comme vous aimez à le chanter ». Il les met au contact du monde invisible : « Que votre foi supplée à ce que contemplent vos yeux, autour de vous il y a vos anges, ils vous montrent le Tabernacle, demandez-le chacun à ce guide de votre âme, qu’il vous obtienne du Sauveur invisiblement présent ici, un accroissement de foi : « Seigneur, viens au secours de mon incrédulité» . Oui, mon enfant répondra votre ange, oui celui que je vois et que j’adore au ciel, c’est celui-là même que tu vas recevoir ; c’est ce Jésus, né pour toi dans l’étable, mort pour toi sur la Croix, instituant pour toi l’Eucharistie ». « Jésus vient, chers enfants, venez à sa rencontre et quand il sera dans votre cœur, consacrez-le lui tout entier, dites-lui, répétez-lui : j’ai trouvé celui que mon cœur aime », lance-t-il encore aux enfants avec sa fougue d’apôtre.

« Sa grande et principale préoccupation était surtout de faire recevoir la communion et d’y préparer les âmes par la confession », insiste le Frère Sadron, revenant sur les visites du Père Planchat aux soldats qu’il confessait dans les avant-postes, durant le Siège de Paris. Alfred Cusset, un ancien du patronage devenu imprimeur, qui était soldat durant cette période, affirme : « Il était le modèle des prêtres ».

Son sacerdoce, comme aurait dit le curé d’Ars, « c’est l’amour du Cœur de Jésus ». Pour lui, le socialisme est un faux remède à l’égoïsme du libéralisme, comme le dira plus tard Léon XIII et le catholicisme social. Il s’agit de se laisser transformer de l’intérieur par la grâce des sacrements pour changer le monde, progressivement, en devenant capable d’écoute et d’amour gratuit. Il s’agit de porter dans son cœur le Cœur de Jésus-Christ, pour donner au monde son sourire et sa bonté !

Le sacrifice du Christ actualisé par la messe, selon le Père Planchat, c’est Dieu qui donne de l’espace à notre liberté – alors qu’il est tout et n’aurait pas besoin de nous – afin que par amour nous retournions à lui. Ainsi chaque sacrement reçu nous fait entrer dans ce mouvement éternel de Dieu, donnant de l’espace à l’autre pour le faire exister et lui permettre d’être pleinement, dans le moment présent.

Là est l’unique grande révolution en mesure de renouveler les rapports sociaux, là s’enracine la doctrine sociale de l’Eglise avec notamment son principe de subsidiarité, qui consiste à régler chaque problème à l’échelon où il se pose, de façon libre, responsable et solidaire. Le sacrifice entendu ainsi suggère la vie du Ressuscité dans le cœur des personnes recevant les sacrements, c’est une réalité grande et belle, constructive, qui n’a rien à voir avec les interprétations sanguinolentes d’une dévotion surannée. C’est aussi ce qui fait dire à Henri Planchat, avec enthousiasme, dans ses notes spirituelles : « Je ne négligerai aucun petit sacrifice ».

À l’heure du grand sacrifice de sa vie, à la prison de Mazas, il écrit à son frère Eugène de lui faire parvenir Les Fiancés, d’Alessandro Manzoni qu’il souhaite relire, en italien.  Veut-il, à la lecture de ce célébrissime roman du XIXème siècle, retrouver ce qu’il a vécu au long de toutes ces années ? Des fiancés, qui après bien des tribulations, finiront par se marier, une société ébranlée par la guerre civile, des épidémies, le mystère du mal, le drame de la liberté humaine, et finalement la victoire de la foi dans la Providence et le miracle de la charité…

« L’Innominato », l’une des figures les plus complexes du livre de Manzoni, trouve la voie du changement de cœur et du pardon, rendant possible enfin le mariage de Lucia et Renzo qu’il avait mission d’empêcher. « J’ai l’enfer dans le cœur », reconnait l’Innomé avant d’éclater en sanglots, tandis que le cardinal Borromeo vient de lui dire – avec des paroles pleines de flamme – que Dieu veut tirer de lui « une gloire que pas un autre ne pourrait lui donner », jetant alors ses bras autour du cou du grand pécheur qui se trouve « comme vaincu par cet élan de charité » (Chapitre XXIII des Fiancés). « Il suffit d’un être humain bon pour qu’il y ait de l’espérance », résume à ce sujet le Pape François dans l’encyclique Laudato si’.

Le Père Planchat croit comme le poète Manzoni dans cette guerre de la miséricorde du Christ, cette guerre dont parle l’Evangile, la guerre de celui qui est venu porter le feu de l’amour de Dieu sur la terre (Lc 12,49). Comme Manzoni, dans ses  Observations sur la morale catholique, il pourrait crier : « Malheur à l’Eglise si un jour elle se réconciliait avec le monde, si elle abandonnait la guerre que l’Evangile a déclarée ! ». Dans ce sens, les prêtres d’aujourd’hui ont en lui un modèle pour annoncer par leur vie, sans concession aux idées en vogue, l’amour du cœur de Jésus qui nous aime.

Comme Henri Planchat, ils sont appelés à la créativité pastorale et au zèle apostolique, pour que le peuple ne se sente pas abandonné, dans les circonstances que nous vivons. Ils sont nos guides pour avancer sur la voie du changement de cœur et du pardon, du courage de la réconciliation, de la confession sacramentelle. Qu’ils ne se fassent surtout pas agents humanitaires de l’assistance sociale mais qu’ils nous aident à crier « j’ai l’enfer dans le cœur », comme l’Innominato dans Les Fiancés, et à éclater en sanglots, nous laissant vaincre par la tendresse du Père céleste !

La vie du Père Planchat rappelle à chacun que l’histoire du salut à un long chemin de fiançaillesentre Dieu et l’humanité, qui aboutit à un mariage, celui du Christ et de l’Eglise, une union qui dans la vie des baptisés ne va pas sans difficultés. « La miséricorde, c’est le chemin qui unit Dieu et l’homme, pour qu’il ouvre son cœur à l’espérance d’être aimé pour toujours malgré les limites de notre péché », selon ce qu’a écrit le Pape François la bulle d’indiction du Jubilé de la Miséricorde 2015-2016 (Misericordiae Vultus). Le Père Planchat, avec son cœur et son regard de miséricorde, nous invite à promouvoir la fraternité pour vaincre la « pauvreté relationnelle » qui frappe notre société mondialisée, sans nous fermer sur le passé car « l’homme peut se convertir et il ne faut jamais se désespérer de changer de vie », selon l’enseignement brûlant d’espérance du Pape François. Nous sommes devant « l’urgence d’avancer dans une révolution culturelle courageuse » (Laudati si’). Une révolution nourrie des sacrements de l’Eglise dans laquelle l’être humain transfiguré – qui depuis deux siècles s’était déclaré « autonome par rapport à la réalité » en sacrifiant au « culte du pouvoir humain sans limites » – pourra à nouveau remplir son rôle de collaborateur de Dieu dans l’œuvre de la création, avec générosité.

Orientés vers cet objectif, en sortant du « pragmatisme utilitariste », « nous devons faire l’expérience d’une conversion, d’un changement de cœur (Laudato si’ – n°218), puisant à la source des sacrements afin de vivre commandement du Christ : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime… » (Jn,15).C’est le message du Père Planchat, martyr de la foi. C’est le chemin vers la plénitude dont a témoigné Jésus avec une immense liberté intérieure, au soir du repas pascal, tandis pourtant qu’il venait d’être trahi et qu’il allait mourir pour nous : « Que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite ».

 

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