La prodigieuse icône miraculeuse de la Vierge Marie, sur les hauteurs de Rome

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par François Vayne
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Très attaché à l'icône mariale romaine du Monte Mario, le cardinal Schönborn, dominicain et archevêque de Vienne, aime rendre visite aux religieuses dominicaines cloîtrées qui en ont la garde.

Saint Jean-Paul II et le Pape Benoît XVI se sont déplacés au Monte Mario pour la vénérer personnellement.

L’antique origine du culte marial à Rome remonte à la prédication apostolique de Pierre et Paul. C’est ainsi que, dans la catacombe de sainte Priscille, sur la Via Salaria, se trouve une des images les plus anciennes de la Vierge, datant du IIIème siècle, où Marie avec l’Enfant Jésus sur ses genoux est représentée face au prophète Balaam, qui indique une étoile, allusion à l’annonce messianique (Nombres, 24). La basilique Sainte-Marie-Majeure a été construite ensuite, au Vème siècle, à l’époque du Concile d’Ephèse (en l’an 431) où Marie fut proclamée Mère de Dieu.

 

Le témoignage d’une dévotion mariale très ancienne dans la Ville éternelle est également attesté par la présence d’icônes remontant à l’époque de la primitive Eglise. C’est d’ailleurs uniquement à Rome et au Sinaï que l’on trouve encore des images sacrées de cette époque, ayant échappé à l’iconoclasme, c’est-à-dire à leur destruction décrétée par l’empereur byzantin Léon III, au VIIIème siècle. Ainsi, une de ces icônes sauvées de l’iconoclasme qui sévissait en Orient se trouve sur le lieu le plus élevé de Rome, le Monte Mario (139 mètres), dans la zone de l’Observatoire astronomique, non loin du site où l’empereur Constantin aurait vu le Christ en Croix, avant sa victoire décisive sur Maxence qui décida de l’avenir du christianisme.

 

Gardée par des religieuses dominicaines cloîtrées, l’image mariale d’environ 70 cm sur 40 cm est peinte sur une planche de bois avec un fond doré. Cette icône de la Vierge dite « Hagiosoritissa » – Vierge de la Sainte Châsse – se présente sans son enfant, légèrement tournée du côté droit, les mains orientées pour la prière. Noble et majestueuse, elle aurait été dessinée par saint Luc au Cénacle mais non peinte de main d’homme -« acheròpita » – du vivant même de la Mère de Dieu, puis portée à Ephèse par saint Jean, d’où elle serait arrivée à Constantinople, où elle a longtemps demeuré jadis, près du reliquaire (la châsse, soros en grec), qui aurait contenu la ceinture de la Vierge.

« Elle intercède, une main sur le cœur et l’autre ouverte et soulevée vers le Père céleste en signe de supplication, comme une avocate », témoigne Mère Maria Angelica, originaire des Pouilles d’où elle est arrivée en 1960, actuelle prieure du couvent des moniales dominicaines du Monte Mario. « Beaucoup viennent ici remercier la Vierge pour son intercession en faveur des besoins des familles », ajoute-t-elle,  au nom de la dizaine de religieuses qui prient quotidiennement autour de cette icône, dans la même attitude orante que leur modèle et leur patronne. « Nous prions pour les malades, pour la paix, et pour le Pape spécialement, que les plus anciennes pouvaient d’ailleurs voir autrefois depuis notre terrasse quand il récitait son chapelet dans les jardins du Vatican, avant que les toits des maisons ne viennent encombrer le paysage », raconte Mère Maria Angelica. À ses côtés les sœurs travaillent dans un profond recueillement, comme Sœur Myriam Béatrice qui restaure des reliquaires, ou Sœur Maria Pia qui peint des icônes sur commande.

Leur communauté qui a plusieurs fois déménagé est la première historiquement fondée à Rome par saint Dominique lui-même, en 1219, pour porter dans la prière la mission des frères dominicains et les intentions de l’humanité. L’icône qu’elles conservent avec foi est dans une armoire ronde tournant sur un pivot, qui permet tour à tour aux moniales de l’admirer dans leur clôture, puis au peuple de la vénérer dans l’église du monastère. « Nous intercédons pour le monde avec l’icône de la Vierge, qui nous montre avec sa main droite le tabernacle quand elle est positionnée vers le cloître, et qui se tourne vers le peuple quand le pivot est orienté vers l’intérieur de l’église », confie Sœur Marie Cécilia, 38 ans, d’origine slovaque. « La prière arrive partout, bien mieux que toutes les prédications, j’en ai fait l’expérience. Oui, la prière est fondamentale, je suis là parce que j’ai expérimenté sa force », témoigne pour sa part Sœur Marie Catherine, 39 ans, d’origine sarde, qui s’est convertie après être tombée de cheval, comme saint Paul, grâce à la prière d’une mère de famille pieuse prénommée Laura. Les religieuses parlent de nombreuses grâces rapportées par ceux qui prient devant cette icône, protectrice de la Ville éternelle, installée près de la maison où Franz Liszt composa l’oratorio Christus et reçut en 1863 la visite de son ami Pie IX, le pape de l’Immaculée Conception.

L’histoire de cette icône est un épopée : sauvée de la destruction par des moniales grecques, elle a longtemps été conservée dans une communauté de religieuses bénédictines à Sainte Agathe in Torre, qui deviendra Sainte-Marie in Tempulo puis Sainte-Marie-du-Trastevere.  Portée par la suite au Latran, sur ordre du Pape Serge III au Xème siècle, elle est revenue chez les bénédictines de Sainte-Marie-du-Trastevere, avant que le Pape Grégoire 1er – dit le Grand – ne la fasse porter en procession pour protéger Rome de la peste. C’est lors de cet évènement que la foule a vu, en haut du château Saint-Ange, la statue de saint Michel remettre son épée au fourreau, au passage de la procession de l’icône Hagiosoritissa, annonçant en même temps la victoire sur le mal et le recul des barbares.

Plus tard, le Pape Honorius III demanda à saint Dominique de rassembler les religieuses de Rome, qui vivaient alors dans un certain désordre. Entraînant à sa suite les sœurs de Sainte-Marie-du-Trastervere et leur fameuse icône miraculeuse, le saint installa sa première communauté de moniales, en 1219, à l’église Saint Sixte, sur la via Appia, à l’endroit où le Pape Sixte II et le diacre Laurent s’étaient rencontrés en allant tous deux au martyre. L’icône restera là pendant des siècles, vénérée comme avocate, avant d’aller plus tard sur le Mont Quirinal, au monastère de Saint Dominique et Saint Sixte, lors de la grande translation du 27 juin 1575, sous le règne de Grégoire XIII. Elle sera couronnée par le chapitre du Vatican en 1641. C’est après la création de l’université dominicaine Angelicum, à la place du monastère de Saint Dominique et Saint Sixte, que l’image sacrée a rejoint le Monte Mario en 1931, dans le nouveau couvent des sœurs dominicaines cloîtrées.

Le 16 novembre 1986, saint Jean-Paul II alla prier devant l’icône, et le Pape Benoît XVI fit de même le 24 juin 2010, persuadés tous les deux que cette Vierge de saint Luc, expression de l’art et de la piété orientale, pourrait contribuer à renforcer les liens de charité entre les Eglises d’Orient et d’Occident, une mission plus que jamais urgente en cette triste période de guerre européenne.

François Vayne  

 

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