La réforme de la curie romaine progresse dans le sens de la synodalité – c’est-à-dire d’une meilleure concertation fraternelle – et de la décentralisation qui favorise une approche réaliste des urgences pastorales. L’évêque de Rome, qui préside plus que jamais à la charité au plan universel, ne reculera pas devant les obstacles, comptant sur la prière du peuple de Dieu qu’il ne cesse de solliciter. Malgré les résistances internes, François fait preuve d’une énergie exceptionnelle, d’abord fruit de sa profonde vie intérieure. Entré ce 17 décembre dans sa 80ème année, il continue par sa cohérence et son empathie, de provoquer l’enthousiasme populaire. Il semble incarner les plus beaux espoirs que chacun porte, pour le renouveau de l’Eglise bien sûr, et pour des relations humaines plus confiantes, pour la paix du monde et la sauvegarde de la création. Mes amis Jean-Louis de la Vaissière et Marie Duhamel lui consacrent deux livres essentiels, en cette troisième année de son pontificat, l’un axé sur la joie extraordinaire qu’il suscite au fil des jours, et l’autre sur l’histoire documentée de sa vie toute orientée selon la volonté de Dieu (1). Avec le temps son secret, inscrit dans sa devise, est connu de tous, c’est la miséricorde. Sa mission est de nous révéler aujourd’hui la force de ce mystère qui peut changer notre existence et l’avenir de l’humanité.
Dimanche dernier, troisième dimanche de l’Avent, il a poussé les battants de la Porte Sainte de la cathédrale de Rome, Saint-Jean de Latran, « mère de toutes les églises », tandis que dans chaque diocèse était aussi ouverte une Porte Sainte, afin que le Jubilé de la Miséricorde puisse être vécu par le plus grand nombre. Elles sont 10.000 à ce jour, ces portes qui symbolisent, sur toute la terre, le désir d’un passage vers une autre manière d’être.
Le message délivré par le Pape est clair : il n’y a pas de place pour le découragement et la tristesse car le Seigneur libère son peuple de toutes les angoisses et remplit notre cœur de joie.
Forts de cette expérience, nous sommes appelés à devenir instruments de la miséricorde du Père, de la tendresse de Dieu, et « de cet amour infini nous sommes responsables, malgré nos contradictions ».
Chaque personne est comme une « antenne du Saint-Esprit »
Mercredi, à l’audience générale, il est revenu sur le sens du Jubilé de la Miséricorde dans lequel il nous entraîne avec énergie. « Nous devons aimer et pardonner comme Dieu aime et pardonne, ouvrir tout grand les portes de notre cœur au Christ qui nous pousse à le porter aux autres », insistait-t-il, précisant que « la confession des péchés est un autre signe important du Jubilé, car c’est en recevant le pardon de Dieu que nous devenons capables de pardonner aux autres ».
Nous savons maintenant ce qui nous reste à faire, même si c’est difficile, le Pape lui-même ayant témoigné publiquement qu’en demandant personnellement pardon de ses propres péchés il trouve régulièrement la force de pardonner telle ou telle personne. « Courage, en avant ! », nous dit-il, convaincu que les petits pas de chacun dans ce sens peuvent transformer la face du monde.
Avec lui nous comprenons que chaque personne est comme une « antenne du Saint-Esprit », capable de recevoir intimement la force divine pour en rayonner autour d’elle. Pour cela il est nécessaire de demander la grâce de l’humilité en reconnaissant que « je suis pécheur », comme François l’a répété à la messe matinale en début de semaine, nous exhortant à avoir un cœur de pauvre, attaché aux vraies richesses de Dieu qui sont spirituelles.
Il a rappelé les mots du martyr Laurent, ce diacre des premiers siècles qui, confronté à ses persécuteurs cherchant l’or de la communauté chrétienne, répondit en désignant les pauvres de Rome : « Voilà le trésor de l’Eglise ».
Le Pape considère au fond qu’il y a « deux routes », l’une empruntée servilement par ceux qui sont « fermés dans leurs calculs », et l’autre où marchent librement ceux qui ont espoir dans la miséricorde du Père… C’est ce qu’il soulignait encore à l’homélie d’une récente messe à Sainte Marthe, dénonçant à ce sujet « la rigidité cléricale » qui ne sait rien de la miséricorde de Dieu, et mettant en valeur au contraire les membres de l’Eglise et toutes les personnes qui voient loin, qui regardent avec Dieu au-delà des problèmes, des douleurs, des difficultés, des péchés.
« Il faut des femmes et des hommes d’espérance », nous lance-il positivement, et prophétiquement. Relevons ce défi avec foi, sans plus attendre.
Vaincre l’indifférence et conquérir la paix
L’espérance que François réveille en nous suppose de « changer de direction, de marche », et d’entreprendre « la voie de la justice, de la solidarité, de la sobriété ». « Ce sont les valeurs imprescriptibles d’une existence pleinement humaine et authentiquement chrétienne », soulignait-il à l’angélus de dimanche dernier, en se félicitant de l’accord sur le climat signé à Paris, dans le cadre de la COP21 où le Saint-Siège était représenté. « Sa mise en pratique demandera un engagement collectif et un généreux dévouement de la part de chacun ».
Dans cet esprit de solidarité globale, refusant de se résigner devant le négatif, le Pape a également salué les efforts en faveur d’un dialogue islamo-chrétien au quotidien, menés par le mouvement des Focolari et des communautés musulmanes d’Italie qui viennent de sceller un « pacte de proximité et de collaboration », notamment pour porter témoignage de la réconciliation et du pardon dans un contexte marqué par la violence et les malentendus.
Comme nous y engage le message du Saint-Père pour la prochaine Journée mondiale de la paix, qui se déroulera le 1er janvier 2016, il s’agit en tout lieu de « vaincre l’indifférence et de conquérir la paix », en nous souvenant que le sang d’Abel a une grande valeur aux yeux de Dieu, et qu’il demande à son frère Caïn d’en rendre compte (Genèse 4, 9-10).
Dans l’élan du Jubilé de la Miséricorde, reconnaissons comment l’indifférence se manifeste dans notre propre vie, et adoptons un comportement qui puisse améliorer la réalité, dans notre famille, notre voisinage, notre milieu de travail.
Merci François pour l’exemple de ta détermination ferme et persévérante sur ce chemin de conversion où tous nous prenons conscience d’être vraiment responsables de tous!
(1) Un combat pour la joie , de Jean-Louis de la Vaissière (Le Passeur éditeur).
Pape François , le très beau livre illustré de Marie Duhamel (Mame), idéal comme cadeau de Noël.