La sagesse du cœur

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Un de mes amis vient de m’avertir qu’il est atteint d’un cancer et qu’il commence une chimiothérapie lundi. Sa confidence m’a bouleversé. J’ai essayé de lui dire combien il compte pour moi, qu’il n’est pas seul, et qu’il vivra. Marie – Marie désolée au pied de la croix, Marie du matin de la résurrection, Marie de toutes les apparitions, en particulier de l’apparition à sainte Thérèse d’Alençon – lui sourit et l’accompagne avec tendresse, j’en suis certain. Il demeure que quand la cloche de la croix sonne dans notre vie, la solitude est immense, et les mots de ceux qui nous aiment semblent bien pauvres. Seule la présence de Jésus crucifié peut sans doute pleinement habiter notre nuit dans ces moments de grand silence. « Avoir la foi ce n’est pas ne pas avoir des moments difficiles mais avoir la force de les affronter en sachant que nous ne sommes pas seuls », dit un tweet du Pape ce 6 février. Bientôt nous célèbrerons la XXIIIème Journée mondiale du Malade, le 11 février prochain, fête de Notre-Dame de Lourdes. Dans son message publié à cette occasion François commente une phrase du Livre de Job – « J’étais les yeux de l’aveugle, les pieds du boiteux » (29,15) – et il le fait dans la perspective de la « sapientia cordis », la sagesse du cœur. Cette sagesse, nous dit-il, est « un comportement inspiré par l’Esprit Saint, dans l’esprit et le cœur de celui qui sait s’ouvrir à la souffrance des frères et reconnaît en eux l’image de Dieu ». « Que de chrétiens rendent témoignage aujourd’hui encore, non par leurs paroles mais par leur vie enracinée dans une foi authentique, d’être « les yeux de l’aveugle » et les « pieds du boiteux » ! Des personnes qui sont proches des malades ayant besoin d’une assistance permanente, d’une aide pour se laver, s’habiller, se nourrir. Ce service, surtout lorsqu’il se prolonge dans le temps, peut devenir fatigant et pénible », remarque le Pape, soulignant qu’il est relativement facile de servir pendant quelques jours, mais « il est difficile de soigner une personne pendant des mois, voire des années, également si celle-ci n’est plus à même de remercier. Et pourtant, voilà un grand chemin de sanctification ! ».

Se charger de l’autre

Ainsi nous pouvons demander à l’Esprit Saint de nous donner la grâce de comprendre la valeur de l’accompagnement, si souvent silencieux, qui conduit à consacrer du temps à ceux qui, grâce à notre proximité et à notre affection, se sentent davantage aimés et réconfortés. « En revanche – dénonce le Pape – quel grand mensonge se dissimule derrière certaines expressions qui insistent tellement sur la « qualité de la vie », pour inciter à croire que les vies gravement atteintes par la maladie ne seraient pas dignes d’être vécues ! ». Il avait apporté son soutien à la dixième édition de la Marche pour la vie, le 25 janvier dernier à Paris, où 45 000 personnes ont manifesté pour s’élever contre « la légalisation des gestes euthanasiques », notamment en soutenant la mère de Vincent Lambert, atteint de lésions cérébrales irréversibles depuis 2008, et pour lequel elle refuse l’arrêt des soins. Les médias aux ordres du pouvoir ont boycotté cet évènement, probablement au nom de la liberté d’expression ? Malgré cette censure caractéristique des « démocraties socialistes », nous continuerons à nous battre pour que notre monde n’oublie pas la valeur spéciale du temps passé auprès du lit d’un malade, la dimension de la gratuité, de l’acte de prendre soin, de se charger de l’autre.

Solidarité de Dieu avec nous

« Voilà pourquoi – insiste encore François dans son message pour le 11 février – je voudrais rappeler à nouveau la priorité absolue de la sortie de soi vers le frère comme un des deux commandements principaux qui fondent toute norme morale et comme le signe le plus clair pour faire le discernement sur un chemin de croissance spirituelle en réponse au don absolument gratuit de Dieu » (Exhortation apostolique Evangelii gaudium, n. 179). Il continue en signalant que les amis de Job cachaient au fond d’eux-mêmes un jugement négatif à son sujet : ils pensaient que son malheur était la punition de Dieu pour une de ses fautes. « Au contraire, la véritable charité est un partage qui ne juge pas, qui ne prétend pas convertir l’autre ; elle est libérée de cette fausse humilité qui, au fond, recherche l’approbation et se complaît dans le bien accompli », explique le Pape, sans concession pour l’orgueil et la volonté de puissance qui se cachent souvent derrière les « bonnes actions » à sens unique. Le Saint-Père poursuit en nous menant au cœur du grand mystère de notre rédemption : « L’expérience de Job trouve sa réponse authentique uniquement dans la croix de Jésus, acte suprême de solidarité de Dieu avec nous, totalement gratuit, totalement miséricordieux. Et cette réponse d’amour au drame de la souffrance humaine, spécialement de la souffrance innocente, demeure imprimée pour toujours dans le corps du Christ ressuscité, dans ses plaies glorieuses, qui sont un scandale pour la foi mais sont également preuve de la foi ».

Habiter la souffrance

Pour ma part ce texte du Pape m’éclaire intérieurement, et je me dis que nous aurions beaucoup à gagner en méditant les paroles guérissantes de François plus souvent. Il nous fait notamment comprendre, à l’approche de la Journée mondiale du Malade, que le passage par la souffrance peut devenir « un lieu privilégié de la transmission de la grâce et une source pour acquérir et renforcer la sagesse du cœur ». C’est le secret de Job qui, à la fin de son expérience, en s’adressant à Dieu, peut déclarer : « Je ne te connaissais que par ouï-dire, mais maintenant mes yeux t’ont vu » (42,5). Plongés dans le mystère de la souffrance et de la douleur, accueilli dans la foi, nous pouvons également devenir « des témoins vivant d’une foi qui permet d’habiter la souffrance elle-même, bien que l’homme, par son intelligence, ne soit pas capable de la comprendre en profondeur ».
Ô Marie, Siège de la Sagesse, intercède comme notre Mère pour tous les malades et pour ceux qui en prennent soin. Fais que, dans le service du prochain qui souffre et à travers l’expérience même de la souffrance, nous puissions accueillir et faire croître en nous la véritable sagesse du cœur.

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