Avec le retour au Vatican du pape émérite Benoît XVI, depuis jeudi dernier – en la fête de saint Athanase, le grand évêque qui résista à l’hérésie arienne – certains s’inquiètent pour le gouvernement de l’Eglise. Ainsi le journaliste Vittorio Messori déclare en substance, dans La Stampa, que si Benoît XVI voulait rester caché il ne fallait pas qu’il revienne habiter dans les jardins du Vatican, en chassant les contemplatives qui occupaient le monastère Mater Ecclesiae où il s’installe, sa présence risquant en plus d’influencer le nouveau pape… De tels propos peuvent choquer, et la meilleure réponse est sans doute de faire référence à la collégialité, dont les deux papes témoignent, et à leur commune humilité fondée dans la prière. Marco Garzonio l’exprime très bien dans le Corriere della Sera, le grand journal laïc italien, soulignant notamment que « la prière est la chose la plus important pour le pape François ». Dans sa première prière via webcam, jeudi 2 mai, François demande au saint d’Assise d’intercéder « pour la paix de nos cœurs ». Il indique ainsi à quelle réforme essentielle il s’attelle, depuis son élection rendue possible par la renonciation exemplaire de Benoît XVI : seul l’amour, quand il nous change nous-mêmes, peut changer le monde.
Samedi le pape préside la prière du Rosaire dans la basilique Sainte Marie Majeure où il avait déposé un bouquet de fleurs à la Vierge au lendemain de son élection, et dimanche il accueille les confréries du monde entier, en particulier celles du Rosaire, rassemblées à Rome pour l’Année de la foi. « La prière du Rosaire nous permet de contempler les mystères de Jésus. En ce mois de Marie, qu’il serait beau si, en famille, avec les amis, en paroisse, nous récitions ensemble le rosaire ou une prière à Jésus et à Marie », disait le pape François à l’audience générale de mercredi 1er mai, fête de saint Joseph artisan. Et, comme dimanche dernier devant des milliers de jeunes confirmants et confirmés, il relie la prière à la capacité nouvelle qui nous y est offerte de vivre notre foi à travers des gestes d’amour, quotidiennement.
« Les deux papes qui l’ont précédé ont enseigné la doctrine, ils nous l’ont rappelé chacun à leur manière, dans de grandes encycliques, maintenant François va nous aider à mettre tout cela en pratique… », résume un prêtre de Vannes, Jean-François Audrain, de passage à Rome cette semaine. De fait le pape Bergoglio, arrivé du Nouveau Monde, semble avoir planté sa tente missionnaire au cœur de l’Eglise, pour nous entraîner vers une réforme qui s’étend de proche en proche, qui se diffuse de l’un à l’autre, comme une onde, dans les relations humaines.
La messe qu’il célèbre tous les matins à 7h dans la résidence Santa Marta où il a choisi de demeurer après le conclave, est l’occasion pour lui de rencontrer petit à petit tous ceux qui travaillent au Vatican, afin de leur transmettre la passion qu’il partage avec le pape émérite : « faire connaître la beauté de l’Evangile aux femmes et aux hommes d’aujourd’hui », selon l’expression de Mgr Angelo Becciu, Substitut de la Secrétairerie d’Etat, qui s’exprimait récemment dans une interview publiée le 1er mai par l’Osservatore Romano. A propos de la réforme structurelle attendue, celle de la curie romaine, Mgr Becciu, actuel véritable bras droit du Saint-Père, précisait dans la même interview que le nouveau pape se donne le temps de la réflexion, et de la prière… Il prendra conseil auprès des huit cardinaux des cinq continents qu’il a nommés le 13 avril dernier, afin de comprendre ce que l’Esprit Saint dit à l’Eglise dans ce moment précis de notre histoire. En attendant les « Fioretti » du pape François ont commencé à changer le monde.