La révolution de la tendresse

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Le Saint-Père poursuit son marathon missionnaire en Amérique. Après avoir été accueilli par le président Obama à la Maison Blanche, il a notamment présidé la célébration de canonisation d’un religieux franciscain espagnol, Junípero Serra, touchant spécialement le cœur des « hispaniques » qui forment près de la moitié des catholiques aux Etats Unis. Ses discours au Congrès, jeudi, puis aux Nations Unies, vendredi, entrent dans l’histoire, tandis qu’il rejoint les familles rassemblées à Philadelphie, ce week-end, avant de s’envoler pour Rome lundi. Je vous proposerai, chers amis lecteurs une synthèse de ce 10ème voyage apostolique de François en début de semaine prochaine, mais en attendant revenons sur les paroles fortes du Pape en particulier sur la « révolution de la tendresse » à laquelle il nous appelle. Commentant en direct pour radio Vatican plusieurs grands rendez-vous de François à Cuba et aux Etats Unis, j’ai été profondément ému par son homélie lors de la messe au sanctuaire de la Vierge de la Charité de Cobre, à Cuba. Dans la basilique où trône la statue de la Vierge Métisse, symbole de l’âme cubaine, couronnée par Jean-Paul II en 1998, le Pape nous a invités à vivre « la révolution de la tendresse, comme Marie, Mère de la Charité ». « Notre révolution passe par la tendresse, par la joie qui se fait toujours proximité, qui se fait toujours compassion et nous conduit à nous impliquer, pour servir, dans la vie des autres ».
Voilà la vraie révolution capable de soulever le monde, de le changer, là où toutes les idéologies politiques ont échoué. « Comme Marie, nous voulons être une Eglise qui sert, qui sort de chez elle, qui sort de ses temples, de ses sacristies, pour accompagner la vie, soutenir l’espérance être signes d’unité ».
Ces mots semblaient synthétiser tout le programme de ce pontificat, en même temps qu’ils introduisaient les conseils fraternels du Pape à l’épiscopat des Etats Unis, deux jours plus tard, quand il a demandé aux évêques des 195 diocèses de cet immense pays de ne pas se comporter en managers mais en pasteurs proches des gens et serviteurs… Cette Eglise catholique aux Etats Unis, avec 77 millions de fidèles, est désormais la quatrième numériquement, après le Brésil, le Mexique et les Philippines. La « guerre culturelle » menée par l’épiscopat américain sur les questions de morale sexuelle est presque inaudible, après les scandales de pédophilie ou plus de 4000 prêtres ont été pénalement impliqués. C’est le témoignage dans le domaine social qui peut entraîner l’adhésion et contribuer au rayonnement de l’Evangile dans l’expérience vécue, et dans la conscience de chacun. La manière du Pape de se présenter à la Maison Blanche, arrivant dans une petite Fiat noire, la plus petite des voitures officielles, était en soi un modèle de cette « conversion » vers laquelle toute l’Eglise doit tendre.

« Un exemple vivant de l’enseignement de Jésus »

« Comme un fils d’immigrés, je suis heureux d’être un hôte en ce pays » a dit François au président Obama, travailleur social dans sa jeunesse, qui venait d’accueillir le Saint-Père en qui il voit « un exemple vivant de l’enseignement de Jésus ». Entre eux le courant passe notamment par rapport à l’urgence de sauver la planète menacée par le réchauffement climatique. « Nous savons que les choses peuvent changer » a répété le pasteur universel, citant sa fameuse encyclique Laudato si’ . « Le message du Pape François va bien au-delà de 1,2 milliards de catholiques dans le monde », reconnaissait récemment Ban Ki-moon, le secrétaire général de l’ONU.
Pour la sauvegarde de la création, le Saint-Père prescrit d’abord et avant tout des remèdes contre « l’anesthésie du cœur », cause de toutes les conduites destructrices, au quotidien, en famille, dans le travail et au plan de la société entière. Selon lui, comme il l’a reprécisé au sanctuaire national de l’Immaculée Conception, à Washington, « il faut reprendre conscience que nous avons besoin les uns des autres ». Ayant canonisé Junípero Serra, ce missionnaire de la Californie surnommé « le père des Indiens » à la fin du XIXème siècle, il a mis en valeur sa manière d’aller à la rencontre des personnes en respectant leur particularités. « Il a su vivre ce qu’est l’Eglise en sortie, cette Eglise qui sait aller par les chemins, pour partager a tendresse réconciliatrice de Dieu ». C’est à cela que nous sommes appelés, à la suite de Jésus qui a toujours « embrassé la vie comme elle se présentait à lui ; avec un visage de douleur, de faim, de maladie, de péché, un visage de blessures, de soif, de fatigue… ».
J’aime la façon dont François en Amérique nous propose de continuer à construire le Nouveau Monde simplement en imitant Jésus dont il résume la Bonne Nouvelle : « Allez et embrassez, en mon nom, toute cette vie comme elle est et non comme il nous plairait qu’elle soit… Allez annoncer l’embrassade miséricordieuse du Père ».
Le prochain Jubilé de la Miséricorde nous y exercera pleinement.

3 Comments

  1. Jean dit :

    On dirait qu’aujourd’hui, la tendresse s’est glissée dans le coeur et entre les coeurs des habitants de l’Amérique… toujours à la faveur de “jeu de regards” … Quelle merveille la manière de vivre du Pape François!
    Jean

  2. Laurence Monroe dit :

    Bravo François pour cet article.
    J’ai moi aussi été très sensible à la douceur avec laquelle le Pape s’est adressé à cette Eglise si blessée et avec quel tact il l’invite à `déchiffrer le mystère du coeur des Hispaniques`, quid seront en effet, bientôt la majorité des catholiques des Etats Unis. Et pourtant ils sont encore si marginallitsés, à cause de leur couleur, de leur culture, de leur pauvreté.

    _ A cet égard, voir le documentaire diffusé sur KTO à l’occasion de ce voyage :
    `Latinos aux Etats-Unis, un peuple de communion`

    http://www.ktotv.com/video/00091214/latinos-aux-etats-unis-un-peuple-de-communion

    `Je suis certain qu’encore une fois ces gens enrichirons l’Amérique et son Eglise` a poursuivi le pape François. Oui, l’autre, celui qui nous déroute, est souvent celui qui justement nous fait avancer vers plus d’humanité; C’est aussi ma conviction et mon expérience:

    Les Latinos aux Etats-Unis peuvent clairement contribuer à cette `révolution de la tendresse`, au pays de la concurrence, de la loi et de l’efficacité économique. Et le symbole de cela? C’est cette vierge de Guadalupe.. qui représente pour eux le visage maternel de Dieu….qui n’est que tendresse et miséricorde…

  3. Christèle Tron dit :

    Un message, finalement , à la portée de tous qui nous rappelle que “l’individualisme ” ambiant est source d’isolement et d’appauvrissement des cœurs .

    Christèle T

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