Ces derniers jours, près de Rome, à Frascati, s’est déroulé un évènement joyeux, l’ouverture du procès de béatification de la fondatrice de l’Œuvre de Marie, Chiara Lubich. Le mouvement dit des Focolari qu’elle a suscité, présent dans le monde entier, tend à réaliser le testament de Jésus : « Que tous soient un, afin que le monde croie » (Jean 17,21). Focolari est un terme italien s’inspirant du petit feu de cheminée qui réchauffe la maison, le « focolare », caractéristique d’un esprit communautaire où règne l’amour fraternel (http://www.focolare.org/). J’avais eu la chance d’interviewer Chiara Lubich pour le quotidien La Croix, avec mon confrère Guillaume Goubert, il y a une quinzaine d’années. Nous avions été touchés par sa simplicité évangélique en même temps que par sa force de conviction pour le service de l’œcuménisme, du dialogue interreligieux et de la rencontre avec les non-croyants. Dans le contexte français si particulier de ce début de l’année, son message vient d’être salué au Capitole de Rome par le prix « Chiara Lubich pour la fraternité » remis à l’association « Vivre Ensemble à Cannes ». Créée en 2011 à l’occasion du 25ème anniversaire de la rencontre interreligieuse d’Assise voulue par saint Jean-Paul II, l’association est issue des différentes communautés confessionnelles de Cannes et exprime le souhait de construire un projet commun contribuant à la paix et la fraternité.
De telles initiatives ne sont-elles pas seules en mesure de faire avancer l’humanité sur un chemin de bonheur, au-delà des crispations identitaires nationales ou soi-disant religieuses, et des références angoissées à une culture du passé ?
« Il est bon de se rappeler que Jésus est le chemin à parcourir, l’espérance qu’il peut y avoir un avenir de fraternité et de paix pour tous », disait le Pape lors de l’audience du mercredi 28 janvier, citant la promesse du Christ à ses disciples : « Je ne vous laisserai pas orphelins ». De fait il nous envoie son Esprit Saint, inspirant à chacun ces petits gestes d’amour qui changent le monde au quotidien, et il nous donne Marie, sa mère, qui apparaît partout sur la terre pour nous inviter à mettre l’Evangile en pratique. Il me semble que rien n’est plus urgent, d’ailleurs mon prochain livre, à paraître durant le Carême qui vient, développera ce sujet, je vous en reparlerai.
Une main qui tient ouverte la porte entre le ciel et la terre
Un avenir de paix pour tous? Dieu ne nous demande rien qu’il ne nous ait donné auparavant : « Nous aimons parce que Dieu lui-même nous a aimés en premier » (1 Jean 4,19). C’est ce que rappelle le Pape dans son message pour le Carême, parlant de ce défi d’aimer les autres, de ne pas s’habituer aux injustices, bref de résister à l’indifférence qui a pris aujourd’hui une dimension mondiale.
François nous présente l’Eglise comme une main qui tient ouverte la porte entre Dieu et l’homme, entre le ciel et la terre, grâce à la proclamation de la Parole, à la célébration des sacrements et au témoignage de la foi agissante dans l’amour. Une main souvent repoussée, écrasée et blessée quand nous tendons à nous enfermer sur nous-mêmes. Il nous encourage à tenir ferme, sachant que « les saints marchent avec nous qui sommes encore pèlerins », et il cite sa sainte préférée, patronne de la France avec la Vierge et Jeanne d’Arc : « Sainte Thérèse de Lisieux, docteur de l’Église, convaincue que la joie dans le ciel par la victoire de l’amour crucifié n’est pas complète tant qu’un seul homme sur la terre souffre et gémit, écrivait : Je compte bien ne pas rester inactive au Ciel, mon désir est de travailler encore pour l’Église et les âmes . Nous aussi, nous participons aux mérites et à la joie des saints et eux participent à notre lutte et à notre désir de paix et de réconciliation. Leur bonheur de jouir de la victoire du Christ ressuscité nous est un motif de force pour dépasser tant de formes d’indifférence et de dureté du cœur ».
Le Pape, ayant ainsi resituer le contexte de notre combat spirituel et fraternel, exprime le désir que les lieux où se manifeste l’Eglise, en particulier nos paroisses et nos communautés, deviennent des « îles de miséricorde au milieu d’une mer d’indifférence »… Pour ne pas nous laisser absorber par la spirale de la peur er de l’impuissance, face aux images bouleversantes de la souffrance humaine, il lance un appel à la prière dans la communion de l’Eglise terrestre et céleste, évoquant une proposition originale « 24 heures pour le Seigneur », les 13 et 14 mars, cette fête de la réconciliation née il y a un an et qu’il espère voir se développer à l’échelle universelle.
Un cœur miséricordieux, un cœur de pauvre
Pour dépasser l’indifférence et nos prétentions de toute-puissance, François nous demande à tous de vivre ce temps de Carême comme un parcours de formation du cœur. « Avoir un cœur miséricordieux ne veut pas dire avoir un cœur faible. Celui qui veut être miséricordieux a besoin d’un cœur fort, solide, fermé au tentateur, mais ouvert à Dieu. Un cœur qui se laisse pénétrer par l’Esprit et porter sur les voies de l’amour qui conduisent à nos frères et à nos sœurs ». « Au fond, un cœur pauvre, qui connaisse en fait ses propres pauvretés et qui se dépense pour l’autre », résume-t-il.
Pour cela, il nous assure prier le Christ avec nous tout au long du Carême : « Rends notre cœur semblable au tien » (Litanies du Sacré Cœur de Jésus). « Alors nous aurons un cœur fort et miséricordieux, vigilant et généreux, qui ne se laisse pas enfermer en lui-même et qui ne tombe pas dans le vertige de la mondialisation de l’indifférence ».
2 Comments
Je pense que Chiara Lubich a une conception de l’unité qui est celle d’une fausse mystique. Je vous invite à lire la petite étude faite par le P. Jean-Marie Hennaux à ce sujet, sur cette page : http://pncds72.free.fr/319_focolari.php
Bien cordialement
Merci pour votre remarque. permettez-moi de vous signaler une autre source d’information, qui me semble plus récente et pertinente : [http://www.zenit.org/fr/articles/l-apport-de-chiara-lubich-a-la-spiritualite->http://www.zenit.org/fr/articles/l-apport-de-chiara-lubich-a-la-spiritualite]
D’ailleurs, je constate que la cause de béatification de Chiara Lubich est ouverte depuis le 27 janvier dernier, ce qui confirme sans doute l’intérêt que l’Eglise porte à sa spiritualité de l’unité, à mon avis plus urgente que jamais.
De tout coeur
François Vayne