Chers amis, avec ce dernier « blog » de l’année 2014 (1), en ces jours où nous partageons la joie de Marie qui va mettre au monde le Dieu fait homme, je vous souhaite, depuis Lourdes où je me trouve, une belle fête de Noël en famille. Aujourd’hui je voudrais d’abord revenir sur l’évènement du rétablissement des relations diplomatiques entre Cuba et les Etats Unis. Un triste chapitre de l’histoire se clôt ainsi, et le premier pape latino-américain y est pour beaucoup. Le président Raul Castro, successeur de son frère Fidel, a publiquement remercié François pour sa médiation auprès du président Obama qui a conduit à la construction de ce nouveau « pont » entre les peuples d’un même continent. Comme journaliste j’avais accompagné en 1998 Jean-Paul II à La Havane, où je compte depuis de nombreux amis, et même un jeune filleul, Fabian Felipe. Voici ce que sa famille vient de m’écrire par internet, dans la spontanéité du moment : « Quelle joie ! Un grand jour, transcendantal, ceci a été grandiose, si émouvant… il y a eu des pleurs, des embrassades, les cloches de toutes les églises de La Habana Vieja ont sonné sans arrêt… c’est un sentiment indescriptible, c’est comme si le cœur allait éclater de joie et d’émotion. Nous rendons grâce au Saint-Père et à Dieu, Grand en Puissance et en Gloire pour toujours, Amen; nous rendons grâce à Marie, Notre Mère, témoin de toutes nos peines et désirs… tous les Cubains et Cubaines rendons grâces à Sa Sainteté pour tous les efforts et la persévérance dans ce succès; que Dieu veuille bien combler ce bonheur, pour qu’il soit complet, avec la venue du Pape François à Cuba. Nous aurions souhaité que tu soies ici pour vivre un moment comme celui-ci, nous aurions voulu que tu soies à nos côtés et que tu puisses sentir ce moment historique pour notre pays et notre vie, nous remercions le Ciel d’avoir été témoins de tout ceci… Souviens-toi que tout ceci arrive durant une journée très spéciale pour les Cubains, 17 décembre, fête de saint Lazare, saint que nous vénérons tout particulièrement à Cuba, avec grande dévotion, te souviens-tu du pèlerinage au Rincon que notre cher Jean-Paul II a réalisé ? Loué soit Notre Seigneur ! L’Amour peut tout ». Ces lignes enflammées d’enthousiasme décrivent bien l’importance de ce qui vient d’advenir, car pour l’Amérique latine c’est l’équivalent de la chute du mur de Berlin. La souffrance quotidienne des Cubains confrontés à un embargo économique injuste et moralement inacceptable était indescriptible, en même temps qu’est impressionnante leur dignité, nourrie d’une foi catholique profonde et d’un grand amour de la Vierge, Notre-Dame de la Charité d’El Cobre, sainte patronne de l’île.
« Défaire les nœuds » entre les nations
La fin des sanctions économiques qui frappaient depuis des décennies la « perle des Caraïbes » nous rappelle qu’il y a toujours un matin, et prouve s’il en était besoin l’efficacité de la diplomatie vaticane qui consiste à « défaire les nœuds » entre les nations. Le cardinal Piero Parolin, Secrétaire d’Etat, l’avait souligné le 5 décembre dernier, lors d’un colloque organisé par Vatican Insider au siège de l’Ordre du Saint-Sépulcre, à Rome, où je travaille, insistant sur la volonté du Saint-Siège de « soutenir toujours la négociation et le dialogue comme moyen de solution des conflits ». C’est aussi ce qui se passe en Ukraine, dans ce pays en proie à la guerre civile où le Pape vient d’envoyer en mission spéciale le cardinal autrichien Christoph Schönborn. Si il est juste de se réjouir parce qu’un mur tombe à Cuba, n’oublions pas que la nouvelle guerre froide qui se manifeste avec le conflit ukrainien, opposant les Etats Unis et la Russie, n’augure rien de bon pour les peuples européens. L’ours russe est blessé par les sanctions euro-américaines, n’est-ce pas le moment où il est le plus dangereux ? « La Russie est l’un des pays nucléarisés les plus puissants du monde. C’est une réalité, pas juste des mots », déclarait cette année Vladimir Poutine, qui se tourne vers l’Asie – la Chine et l’Inde en particulier – pour trouver de solides alliés… Comme l’écrit par exemple un de mes confrères du Figaro, l’Europe « devrait montrer la voie et accompagner Moscou vers une levée de l’embargo au lieu de suivre docilement l’allié américain en adoptant un nouveau train de sanctions ».
La confiance de saint Joseph
Face à la montée des périls, le Pape nous appelle à prier sans cesse pour nos gouvernants, en nous aidant des doigts de la main. Pour cela il a fait distribuer dimanche dernier un livret tout simple, donnant des clés populaires pour la prière, indiquant qu’avec le pouce nous pouvons prier pour nos proches, avec l’index pour ceux qui sont chargés d’éduquer ou d’enseigner, avec le majeur pour ceux qui gouvernent le monde, avec l’annuaire pour les plus faibles et les malades ainsi que pour les couples, et enfin pour nous-mêmes avec le petit doigt… J’ai personnellement trouvé cette méthode très pratique et je l’ai adoptée, sûr que Dieu est maître de l’histoire. À l’approche de Noël recevons cette confiance de saint Joseph, comme le Pape l’a proposé jeudi dernier lors de la messe du matin. Apprenant que Marie, sa future épouse, était enceinte, Joseph n’a pas compris mais il savait Marie incapable d’infidélité. Son expérience montre, a expliqué le Pape, que « dans ces moments durs, les élus de Dieu, pour continuer l’histoire, doivent prendre sur eux le problème, sur leurs épaules, sans comprendre. C’est comme ça que Dieu fait l’histoire ». « Quand nous nous trompons, a-t-il ajouté, Dieu corrige l’histoire et Il nous fait avancer, plus loin, toujours en marchant à nos côtés. Et si cela n’est pas clair pour nous, nous ne comprendrons jamais Noël, ni l’Incarnation du Verbe »…
Une paix vraie et juste en Terre Sainte
Avant de conclure ces quelques lignes, j’aimerais que nous tournions notre regard intérieur vers la Terre Sainte, où s’est produit le miracle de l’incarnation divine. Les Palestiniens, chrétiens et musulmans, cherchent le soutien de l’ONU au sujet de l’occupation israélienne. Ils ont fait déposer mercredi soir un projet de résolution réclamant la fin de l’occupation en Cisjordanie et à Jérusalem-Est d’ici à deux ans, ce que l’Etat hébreu a dénoncé comme « un acte de guerre »… Les dirigeants d’Israël espèrent un veto américain au Conseil de sécurité, mais avec ce qui vient de se passer à Cuba les règles du jeu n’ont-elles pas changé? Barack Hussein Obama brise les tabous, et il lui reste deux ans de mandat pour laisser une trace positive dans l’histoire en s’attaquant aux racines du mal qui nourrit le terrorisme international. Comme le confiait le cardinal Carlo Maria Martini à la fin de sa vie, « la première chose nécessaire pour la paix, c’est une paix vraie entre Israël et la Palestine; tant que là il y aura la guerre, il n’y aura pas la paix dans le monde ».
(1) Comme ce serait intéressant de publier davantage vos réactions et témoignages ! J’espère que vous m’adresserez plus souvent vos réflexions en 2015, à partir de la messagerie prévue en bas de cette page. N’hésitez pas à partager vos trésors, en ligne, pour que nous nous enrichissions mutuellement sur ce carnet de bord.