Une vague de catéchumènes en France : « Ils découvrent la nouveauté de l’Evangile »

Entretien avec Mgr Vincent Jordy, archevêque de Tours (64 ans), Vice-président de la Conférence des évêques de France. 

« Nous observons une augmentation importante du nombre de demandes de baptême et d’entrée en catéchuménat. Ce phénomène se vérifie dans l’ensemble des diocèses de France, dans le rural comme en milieu urbain. Comment expliquer ce phénomène ? Il semble que plusieurs facteurs puissent jouer. Le premier semble être le contexte général d’un monde déstabilisé et dans lequel il est difficile de se projeter pour penser à l’avenir et découvrir du sens. La foi chrétienne, la personne de Jésus et le message de l’Evangile viennent alors apporter un éclairage qui de plus est souvent totalement nouveau pour des générations qui n’ont reçu aucune transmission de la foi en famille. Ils ne sont pas marqués par les ressentiments à l’égard de l’Eglise, mais découvrent la nouveauté et la fraîcheur de l’Evangile et de Jésus. D’autre part, la crise du covid, l’expérience du confinement à montrer qu’il ne suffit pas d’avoir des centaines d’« amis » sur les réseaux sociaux pour avoir quelques vrais amis avec lesquels une rencontre véritable et des soutiens peuvent se tisser. Or de nombreux jeunes découvrent l’Eglise comme une communauté accessible, fraternelle et qui les accueille simplement, tels qu’ils sont, au sein d’une famille. Dans un monde où la gratuité, la liberté sont souvent mises en péril, des jeunes découvrent ainsi une communauté différente qui veut leur bien et leur liberté spirituelle. Certains analystes ajoutent que viennent demander le baptême ceux qui ne l’ont pas reçu dans l’enfance. Mais en cela, on peut répondre que ces catéchumènes auraient pu faire comme d’autres et ne jamais le demander. Or ils sont là, et nous découvrons comment l’Esprit-Saint travaille leurs cœurs et une vraie rencontre de Jésus peut se faire. Quand j’écoute les témoignages de manière générale, j’observe que l’Esprit-Saint vient les toucher dans des circonstances très variées : une question qui se pose à l’occasion du décès d’un proche, le souvenir de la prière d’une grand-mère qui témoignait de sa foi, la sagesse d’un grand-père aimé qui était pratiquant, une recherche sur internet pour comprendre ce qu’est la religion… Les parcours sont aussi variés que les personnes, mais ce qui est vraiment frappant, c’est que comme le souligne le Pape François dans la première phrase d’Evangelii Gaudium, une rencontre avec Jésus vivant se fait dont on découvre qu’elle produit de la joie. Ce que j’observe aussi, c’est la persévérance étonnante de certains catéchumènes qui sont venus parfois plusieurs fois frapper à la porte d’un presbytère pour trouver enfin quelqu’un, ou encore des adolescents – collégiens ou lycéens –, qui persévèrent malgré le manque de soutien, voire l’ironie de leur entourage. Il y a alors là des témoignages parfois très touchants de jeunes ayant persévéré et dont a joie est évangélisatrice, et parfois leurs propres parents finissent par être touchés et par demander le Baptême ou la Confirmation. Notre diocèse enverra une centaine de jeunes à Rome pour le jubilé. Il y a parmi eux des catéchumènes et des néophytes. Nous nous réjouissons qu’ils découvrent la dimension universelle de l’Eglise. Mais c’est aussi à nous, après les avoir accompagnés jusqu’au baptême, de continuer à les porter ensuite ».

Propos recueillis par François Vayne