Le témoignage rapporté au Synode d’un enfant de parents divorcés remariés qui, le jour de sa première communion, a donné un bout de son hostie à son papa et un autre à sa maman, a touché les participants de l’assemblée réunie à Rome autour du Pape, et les médias y ont fait abondamment écho. « La communion a de nombreuses formes dans l’Eglise », tempèrent néanmoins certains, comme par exemple Mgr Enrico Solmi, évêque de Parme, qui fut président de la commission des évêques italiens pour la famille et pour la vie. La lecture de l’Evangile qui est « nourriture », et aussi le service des autres, l’union avec Dieu, ou encore l’unité avec les pasteurs de l’Eglise, sont également des sources de communion.
Au-delà du fameux sujet polémique qui passionne les rédactions – l’accès ou non des divorcés remariés à l’eucharistie – il apparaît désormais clairement que le Synode des évêques sur la famille a une portée historique bien plus large que cette question très occidentale, et qu’il favorisera essentiellement la « conversion de la papauté » tant souhaitée par François (Evangelii gaudium, 186-192).
S’agissant des débats de l’assemblée, et des propositions finales qui seront présentées au Pape, cette troisième et dernière semaine du Synode est sans doute cruciale, cependant la dynamique de l’évènement dessine déjà le nouveau profil d’une Eglise universelle « décentralisée » et à l’écoute des personnes dans la réalité de leurs situations parfois compliquées.
Les évêques pourraient ainsi bientôt se trouver davantage devant leurs responsabilités au service du peuple de Dieu, en fonction des divers contextes culturels locaux.
Lors de la canonisation de Louis et Zélie Martin, les parents de sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, dimanche, en présence des pères synodaux réunis place Saint-Pierre, François a d’ailleurs surtout parlé de la mission épiscopale, « l’humble service qui devrait caractériser l’autorité selon l’enseignement de Jésus », insistant sur « l’incompatibilité entre ambitions, arrivismes, honneurs, succès, et la logique du Christ crucifié ».
S’il a mis en valeur « le service » vécu dans la famille par ces deux époux canonisés ensemble – une première dans l’histoire – c’est afin d’encourager chacun, et ses frères évêques en priorité, à « persévérer sur la route du service joyeux des frères ». Cette « atmosphère pleine de foi et d’amour » et ce « climat » de service où germent les vocations, comme celles de sainte Thérèse et des autres filles Martin, le Pape voudrait en effet qu’ils caractérisent toute la vie des Eglises locales, formant ensemble la grande famille du « saint peuple de Dieu ».
Remettant de cette manière la famille au cœur de l’Eglise et de la société dans laquelle elle est plongée, François fait de ce Synode qui s’est déroulé sur deux ans le véritable levier de la réforme ecclésiale profonde pour laquelle il a été élu.
« Il est génial » s’exclamait en privé un cardinal de grande envergure pastorale et théologique, commentant le discours du Pape prononcé samedi dernier dans la salle Paul VI, devant les pères synodaux et les participants laïcs d’une rencontre marquant le 50ème anniversaire de la création de l’institution synodale par le bienheureux Paul VI.
Rappelant que le mot synode signifie étymologiquement en grec « cheminer ensemble » – laïcs, pasteurs et évêque de Rome – François a souligné que le peuple de Dieu est constitué de tous les baptisés formant « une demeure spirituelle et un sacerdoce saint », selon les termes du Concile Vatican II, exprimant son grand désir d’en finir avec une forme d’autorité cléricale qui ne soit pas « l’autorité du service ».
Le premier concile des apôtres à Jérusalem pour référence
Utilisant l’image d’une « pyramide renversée », il a situé le sommet de l’Eglise « sous la base », demandant que ceux qui exercent l’autorité se comportent comme « les plus petits de tous », chaque évêque étant « vicaire du Christ » pour la portion du troupeau qui lui est confiée, « vicaire de ce Jésus qui lors du dernier repas s’est abaissé à laver les pieds de ses apôtres », le pape n’étant rien d’autre que le « serviteur des serviteurs ».
Dans l’élan évangélique d’une Eglise synodale, qui « chemine ensemble » aux côtés des hommes de ce temps, le Saint-Père a explicité sa volonté que les conférences épiscopales se saisissent localement des problématiques liées à leurs territoires, évoquant le proche horizon d’une salutaire « décentralisation » (Evangelii gaudium, 16)… Le successeur de Pierre, garant de la communion entre tous, participerait à ces synodes ou conciles régionaux, comme au premier concile de Jérusalem ou « concile des apôtres » que le cardinal Christoph Schönborn a cité en référence lors de sa conférence commémorative pour ces 50 ans du Synode, qui précédait l’intervention du Pape. Décrivant ce « synode ordinaire » de Jérusalem qui a ouvert la porte de l’Eglise aux païens, après des discussions tendues autour des témoignages de Paul et Barnabé, le cardinal Schönborn a relié aux origines l’ouverture entreprise par François, pour que toutes les structures juridiques de l’Eglise fassent en sorte de devenir plus missionnaires.
Cette « conversion de la papauté » conduisant l’Eglise décentralisée à « la participation, la solidarité et la transparence dans l’administration », aidera aussi la société civile, espère le Pape, à « s’édifier dans la justice et la fraternité », faisant grandir « un monde plus beau et plus digne de l’homme pour les générations qui viendront après nous »…
N’est-ce pas une réponse à la « procession » hors de la paroisse que la Vierge Marie demandait quand elle s’est manifestée à Lourdes, au moment où le souverain pontife perdait le pouvoir temporel symbolisé par ses « Etats », le Ciel cherchant alors à orienter l’Eglise vers une réforme intérieure pour qu’elle ressemble davantage à un peuple en marche?
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Vraiment François, en même temps que je vous lis, vous faire haut parleur du Saint père, je me sens me mettre en route dans cette procession de conversion avec tous mes frères de la terre et du ciel , merci et “corragio” . André