François continue à briser les lieux communs, tel que celui de la « femme tentatrice » qui inspirerait le mal, et il plaide en faveur d’une théologie de femme qui soit à la hauteur de la bénédiction dont elle est porteuse pour toutes les générations. Concluant ce mercredi sa catéchèse de près d’un an sur le thème du mariage et de la famille – à la veille de participer à la VIII° rencontre mondiale des familles à Philadelphie, aux Etats Unis – il a en effet parlé du « secret et de la bénédiction spéciale » que porte chaque femme, « comme la femme de l’Apocalypse, qui court cacher son enfant afin qu’il échappe au dragon » (Ap 12,6). Mettant ainsi en valeur le rôle de la femme qui fait barrière au mal en transmettant la vie, la mémoire et l’espérance, il a réaffirmé l’importance « stratégique » d’une « alliance renouvelée » entre elle et l’homme, pour résister à « la colonisation de l’argent » et aux idéologies destructrices qui menacent la famille humaine. « Le monde créé est confié à l’homme et à la femme : tout ce qui arrive entre eux laisse une empreinte. Leur refus de la bénédiction de Dieu conduit fatalement à un délire de toute puissance qui ruine toute chose. C’est ce que nous appelons le « péché originel ». Et nous venons tous au monde porteurs de cette maladie », a expliqué le Pape. Plus loin il a rappelé que le Christ, né d’une femme (Galates 4,4), est « la caresse de Dieu sur nos plaies, sur nos erreurs, sur nos péchés », invitant chacun à cheminer dans une attitude fraternelle avec l’autre, en acceptant sa différence, selon le dessein de Dieu qui vise à faire de l’humanité une famille.
Ses paroles s’inscrivent dans la perspective du Synode sur la famille, deuxième étape d’un processus où l’Eglise voudrait se montrer comme « une mère qui aime », qui éduque et accompagne, nous laissant libres dans notre rapport avec Dieu.
Les divorcés remariés, dont le mariage religieux demeure valide, pourront-ils retrouver l’accès aux sacrements et à quelles conditions? Cette question, la plus difficile à résoudre, cristallise actuellement toutes les attentes et toutes les tensions. Une fronde d’opposants s’organise pour barrer la route aux réformes, comme ce fut le cas il y a cinquante ans, lors du concile Vatican II.
L’un des huit cardinaux italiens membres de ce Synode, Edoardo Menichelli, l’archevêque d’Ancône, explique que la volonté du Pape est de sortir du « juridisme » au profit de la dimension évangélique. Pour lui en effet le verbe le plus adapté au Synode est bien « accompagner », sachant que « c’est Dieu qui œuvre dans les consciences des personnes et qui « mesure » à sa façon les choix de ses enfants ».
Un appel à faire sourire le monde
La flexibilité existentielle qui a marqué les premiers siècles de la vie de l’Eglise, c’est-à-dire l’attention aux situations particulières vécues par les gens – que l’on retrouve dans les Eglises d’Orient – s’oppose à l’interprétation légaliste très « latine » accumulée avec l’héritage du droit romain.
Ce que François résumait une nouvelle fois quand il a dit durant la messe de mardi à Santa Marta, en la fête de Notre-Dame des Douleurs : « La maternité de Marie s’étend à toute l’Eglise. Penser l’Eglise sans cette maternité c’est penser à une association rigide, sans chaleur humaine orpheline ». Humilité, accueil, compréhension, bonté, pardon, tendresse, sont les signes de cette maternité « contagieuse » – souligna le Pape – reprenant l’enseignement des anciens moines russes qui nous recommandent d’aller « sous le manteau de la Sainte Mère de Dieu » dans les moments de turbulences spirituelles.
Ceux à qui une mère a manqué sont rigides, raides, ils s’accrochent à la discipline et ne savent pas sourire aux autres, notait François avec beaucoup de réalisme, considérant que rien n’est plus beau que de « sourire à un enfant et le faire sourire ».
Nous retrouvons dans cet appel à faire sourire le monde tout le programme de ce pape de la relation humaine, qui nous aide à comprendre que la vie chrétienne n’est pas un catalogue de règles doctrinales abstraites mais la rencontre avec une personne, un ami, le Christ, dont la joie nous ouvre les yeux sur l’essentiel et nous réchauffe intérieurement.
La conversion attendue est probablement là, la notre et celle de toute l’Eglise.
Au fond, comme l’a rapporté le cardinal Gualtierro Bassetti, archevêque de Pérouse, après un échange récent avec François : « Il ne s’agit pas tant de changer grand chose dans notre pastorale, il s’agit de changer de mentalité, dans la tête et dans le cœur ».
L’heure n’est-elle pas venue de sortir de la religion comme système uniquement basé sur le culte et le sacré, pour cultiver une relation vraie et centrale avec le seul Saint, le Dieu fait homme?
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C’est son expérience qu’il donne, le Pape François , chaque fois – et c’est souvent- que je sens que quelque chose se referme en moi par rapport à ce ou ceux que je rencontre, c’est cela la chose à changer, à déplacer pour réouvrir le coeur et l’esprit à la rencontre ;
cette réouverture elle se fait en regardant Jésus crucifié depuis le manteau de Marie des Douleurs parcequ’Ils continuent à triompher de la mort et nous entraînent à vivre.