Alors que nous allons célébrer la fête de Pentecôte, je vous propose de revenir sur ce qu’a dit le Pape au sujet de l’Esprit Saint, intarissable source d’unité, au cours de son récent voyage en Roumanie, du 31 mai au 2 juin. Vingt ans après l’inoubliable visite de saint Jean-Paul II, premier pape qui se rendit dans un pays à majorité orthodoxe, François a plaidé pour qu’ensemble les chrétiens décident de « donner Dieu » avant de « dire Dieu »… Un des moments les plus significatifs de ces trois jours aura été dans ce sens sa rencontre avec le Synode permanent de l’Eglise orthodoxe roumaine, à Bucarest.
Nous savons que le régime communiste avait voulu forcer l’Eglise gréco-catholique à passer à l’orthodoxie, confisquant tous ses biens et martyrisant ses prêtres et ses évêques de façon atroce. Aujourd’hui moins de 10% des lieux de culte de cette Eglise catholique de rite oriental ont été restitués, pourtant le Saint-Père, avec humilité, a insisté sur la « fraternité du sang » qui, « comme un silencieux courant vivifiant », n’a jamais cessé d’irriguer et de soutenir au long des siècles le cheminement des fidèles du Christ de diverses confessions.
« Les liens de foi qui nous unissent remontent aux apôtres, témoins du Ressuscité, en particulier au lien qui unissait Pierre et André qui, selon la tradition, a apporté la foi en ces terres. Frères de sang (Marc 1, 16-18), ils le furent aussi, et de manière particulière, en versant leur propre sang pour le Seigneur », a souligné l’évêque de Rome, désireux avant tout de servir l’unité. Il évoqua d’ailleurs le cri spontané « Unité, unité ! » qui s’éleva à Bucarest en 1999, durant la rencontre de Jean-Paul II et du Patriarche roumain Teoctist, y discernant « une annonce d’espérance née du peuple de Dieu, une prophétie qui a inauguré un temps nouveau : le temps de marcher ensemble dans la redécouverte et le réveil de la fraternité qui nous unit déjà ».
Pour François l’évocation des pas faits côte à côte encourage à « poursuivre vers l’avenir dans l’action de grâce d’une atmosphère familiale à redécouvrir, dans la mémoire de communion à raviver qui, comme une lampe, éclaire les étapes de notre cheminement ».
Il a exhorté fortement à la solidarité entre catholiques et orthodoxes « pour ne pas céder aux séductions d’une culture individualiste qui peut-être n’est plus idéologique comme aux temps de la persécution athée, mais qui est toutefois plus persuasive et tout aussi matérialiste ». « Nous avons besoin de laisser la force de l’Esprit Saint réchauffer nos cœurs », ajouta-t-il, soulignant l’actualité du trajet qui va de Pâques à Pentecôte.
« De cette aube pascale d’unité, née ici il y a vingt ans, nous avons cheminé vers une nouvelle Pentecôte », fit-il remarquer, comparant cette expérience spirituelle à celle des disciples pour lesquels Pâques a inauguré le début d’un nouveau cheminement dans lequel, toutefois, les craintes et les incertitudes n’avaient pas disparu. « Ce fut ainsi jusqu’à la Pentecôte quand, réunis autour de la Sainte Mère de Dieu, les apôtres, dans un seul Esprit et dans une pluralité et une richesse de langues, témoignèrent du Ressuscité par la parole et par la vie », rappela le Saint-Père.
Il conclut dans un puissant élan de foi avec ces mots qu’il nous faut lire et relire en ces jours : « Que l’Esprit Saint nous renouvelle, lui qui dédaigne l’uniformité et aime modeler l’unité dans la diversité la plus belle et la plus harmonieuse. Que son feu consume nos méfiances ; que son vent balaie les réticences qui nous empêchent de témoigner ensemble la vie nouvelle qu’il nous offre. Lui, artisan de fraternité, qu’il nous donne la grâce de cheminer ensemble. Lui, créateur de la nouveauté, qu’il nous rende courageux dans l’expérimentation de voies nouvelles de partage et de mission. Lui, force des martyrs, qu’il nous aide à ne pas rendre infécond leur sacrifice ».
Touts les rendez-vous du voyage auront été rythmés par cet élan extraordinaire pour un homme de 82 ans bientôt, qui puise sa force surnaturelle dans la prière; ainsi par exemple au sanctuaire marial de Sumuleu-Cuic, symbole de la résistance contre l’invasion ottomane, au cœur de la Roumanie, ou encore à Blaj lorsqu’il a béatifié sept évêques martyrs de la dictature marxiste avant de demander pardon aux Roms pour la ségrégation qu’ils ont eu longtemps à subir.