« Comme il est important d’écouter la vie ! »

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Nous avons prié le Rosaire et invoqué l’archange saint Michel, tout au long de ce mois d’octobre, comme le Saint-Père nous l’a demandé, tandis que se déroulait à Rome le Synode des évêques, consacré à la jeunesse. Ils étaient 270 évêques du monde entier, réunis autour du Pape à l’écoute des jeunes, venus « faire synode », c’est-à-dire cheminer avec eux, désireux de regarder en face la diversité des situations dans lesquelles ils vivent. Aucun groupe institutionnel de leaders n’avait encore jamais accordé tout ce temps à des jeunes, pour mieux accueillir leurs demandes exprimées avec franchise, sans réponses ni recettes toutes prêtes.  Le thème des abus sur mineurs commis par des clercs a notamment été largement discuté, avec à la clé des propositions pour un meilleur discernement des vocations sacerdotales et la formation des prêtres de demain.

 

L’ample document consensuel produit par le Synode – 55 pages et 167 articles – laisse entrevoir quelques ouvertures futures pour décléricaliser une Eglise catholique désormais plurielle, en particulier la nécessité d’accorder davantage de place aux femmes dans les instances décisionnelles de la Curie romaine et des diocèses. Les jeunes, habitués à la mixité et à la parité dans la société, ont dans ce sens secoué cette assemblée universelle d’évêques chargée de conseiller le Pape pour des orientations ecclésiales nouvelles. Cependant l’essentiel de cet événement n’est certainement pas de l’ordre de l’organisation mais plutôt du domaine de l’expérience communautaire vécue. Avait-on déjà vu des cardinaux jouer du piano pendant que des jeunes chantent, ou encore danser franchement avec eux? Nous n’oublierons pas ces images de l’ère digitale qui dessinent une Eglise-famille de Dieu bien éloignée d’un vieux modèle clérical et hiérarchique progressivement dépassé.

Selon ce qu’expliquait le successeur de Pierre dimanche 28 octobre, lors de la messe de clôture de ce Synode,  pour les pères synodaux il s’agissait d’abord d’écouter, comme Jésus le fait dans l’Evangile avec l’aveugle Bartimée, abandonné et mal aimé. « Il est aveugle et il n’a personne pour l’écouter. Jésus entend son cri. Et quand il le rencontre, il le laisse parler », notait François durant l’homélie. « Voilà la première étape pour faciliter le cheminement de foi : écouter. C’est l’apostolat de l’oreille : écouter, avant de parler », ajoutait-il, précisant : « Comme il est important pour nous d’écouter la vie ! ». C’est exactement ce qu’ont fait les évêques pendant plus de trois semaines, se laissant « pétrir » par l’Esprit Saint dans une ambiance conviviale marquée par la vérité des échanges avec les auditeurs, laïcs pour la plupart. Les questions de morale sexuelle et d’accompagnement dans la foi des personnes homosexuelles ont par exemple été abordées sans tabou, même si, sur ces sujets, certains articles du document final ont recueilli parfois le vote négatif d’un nombre significatif  d’évêques.

« Je voudrais dire aux jeunes, au nom de nous tous, les adultes : excusez-nous si, souvent, nous ne vous avons pas écoutés ; si, au lieu de vous ouvrir notre cœur, nous vous avons rempli les oreilles. Comme Église de Jésus, nous désirons nous mettre à votre écoute avec amour, sûrs de deux choses : que votre vie est précieuse pour Dieu, parce que Dieu est jeune et qu’il aime les jeunes », résumait le Pape ce dimanche, tandis que les membres du Synode avaient pris part à un pèlerinage à pied, trois jours plus tôt, mêlant les diverses fonctions et générations en un seul peuple de marcheurs, proches les uns des autres. Cette proximité s’est manifestée fortement, à tel point que l’on a pu entendre « la voix des jeunes dans la voix des évêques » s’est réjouie devant la presse une religieuse française participante.

Le Pape a souligné cela en commentant l’Evangile dominical : « Regardons Jésus, qui ne délègue pas quelqu’un parmi la “foule nombreuse” qui le suivait, mais qui rencontre Bartimée personnellement. Il lui dit : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? »…. Voilà comment fait Dieu, en s’impliquant en personne, avec un amour de prédilection pour chacun », souligna le Saint-Père, rappelant que «  la foi germe dans la vie », « la foi passe par la vie ». Ainsi ce Synode illustre bien le message que le pontificat actuel délivre à toute l’Eglise : « Nous ne pouvons pas être des doctrinaires ou des activistes ; nous sommes appelés à poursuivre l’œuvre de Dieu à la manière de Dieu, dans la proximité : liés à Lui, en communion entre nous, proches de nos frères ».

François nous interpelle à nouveau à la fin du Synode : « Demandons-nous si nous sommes des chrétiens capables de devenir proches, de sortir de nos cercles pour étreindre ceux qui “ne sont pas des nôtres” et que Dieu cherche ardemment ». « Reconnaissons que le Seigneur s’est sali les mains pour chacun de nous, et en regardant la croix ; et repartons de là, nous rappelant que Dieu s’est fait mon prochain dans le péché et dans la mort. Il s’est fait mon prochain : tout commence à partir de là. Et quand par amour pour lui, nous aussi, nous nous faisons proches, nous devenons porteurs d’une vie nouvelle : non pas des maîtres de tous, ni des experts du sacré, mais des témoins de l’amour qui sauve ».

La dernière étape synodale décrite par le successeur de Pierre, après l’écoute et la proximité, est celle du témoignage capable de ressusciter le cœur de qui souffre et désespère dans les ténèbres. « Tant d’enfants, tant de jeunes, comme Bartimée, cherchent une lumière dans la vie. Ils cherchent un amour vrai. Et comme Bartimée, malgré la nombreuse foule, appelle seulement Jésus, de même eux aussi cherchent la vie, mais souvent ils ne trouvent que de fausses promesses et peu de personnes qui s’intéressent vraiment à eux », a constaté le Pape, nous invitant à être non « une ONG, une organisation semi-publique », mais « la communauté des sauvés qui vivent la joie du Seigneur » et font sentir la présence amicale de Jésus.

« La foi est une question de rencontre, non pas de théorie. Dans la rencontre Jésus passe, dans la rencontre palpite le cœur de l’Église. Alors, non pas nos sermons, mais le témoignage de notre vie sera efficace », concluait François, victorieux une fois de plus de ses ennemis à travers le rayonnement de cet événement synodal qui promet des prolongements, tels que la coresponsabilité ecclésiale, le dialogue intergénérationnel, l’intégration des jeunes dans les processus de réflexion et de décision au niveau diocésain, voire même probablement la tenue d’un prochain synode sur la présence et le rôle des femmes dans l’Eglise.

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