La place Saint-Pierre est vide, Rome est déserte. Nous vivons des heures qui semblent irréelles. Tout ou presque est en stand-by, au moins jusqu’au 3 avril prochain. Depuis hier, après la fermeture de mon bureau sur ordre de nos responsables, je suis confiné à la maison comme la grande majorité des habitants de l’Italie, sans possibilité de sortir, sauf pour faire les courses, sous peine d’une condamnation pénale. Qui sait vraiment combien de temps durera cette « quarantaine »? Nous n’avons plus de contact direct avec personne, c’est une sorte d’enfer. Les barrages policiers veillent à ce que nous respections les nouvelles directives.
Plus de 120 pays sont touchés par la pandémie du coronavirus, avec près de 140 000 malades dans le monde et plus de 5000 morts à ce jour. La péninsule italienne a déjà dépassé la barre des 1000 morts hier et compte 250 nouveaux décès pour la seule journée de ce 13 mars, de plus nous atteignons le chiffre très alarmant de quelque 17 000 personnes officiellement infectées dans le pays, sans compter toutes celles qui ne le savent pas encore. Ce qui ne nous est pas beaucoup dit, c’est que les malades en thérapie intensive, atteints de pneumonies, sont anesthésiés et intubés, alimentés en oxygène par des machines, mourant généralement dans leur sommeil, loin de leurs proches et sans funérailles… La situation est apocalyptique : pas de célébrations eucharistiques, pas de sacrements, il nous reste la prière du chapelet heureusement pour demander la protection céleste, spécialement sur nos familles et nos amis.
Le dérèglement climatique causé par la pollution industrielle, les incendies en Australie liés au réchauffement de la planète, les sauterelles tigres détruisant les cultures en Afrique de l’Est, et maintenant cette terrible maladie respiratoire meurtrière : ne s’agirait-il pas de nouvelles « plaies d’Egypte », comme dans le livre biblique de l’Exode (Ex 9,3), qui pourraient avoir pour conséquence la libération de l’humanité de l’esclavage du capitalisme mondialisé ? Je risque cette comparaison, sachant bien que la main de l’Eternel n’est pour rien dans ces catastrophes mais qu’elles nous rapprochent mystérieusement de lui et en même temps les uns des autres, au-delà des logiques matérialistes. « Laisse partir mon peuple afin qu’il me serve dans le désert » (Exode 7, 16), semble vouloir dire Dieu aux petits pharaons libéraux d’aujourd’hui dont les cœurs se sont appesantis… Il nous appartient de vivre cette crise à la lumière de l’enseignement biblique, comme un chemin de libération intérieure par rapport aux excès planétaires, selon ce que propose le Carême catholique actuel, route de Pâques sur laquelle nous marchons avec une foi renouvelée, malgré l’interdiction des messes par le gouvernement italien.
Le Pape François, depuis la chapelle de la Maison Sainte-Marthe, en ce septième anniversaire de son élection, a prié « pour les pasteurs qui doivent accompagner le peuple de Dieu dans cette crise ». « Que le Seigneur leur donne la force et aussi la capacité de choisir les meilleurs moyens d’aider. Les mesures drastiques ne sont pas toujours bonnes, c’est pourquoi nous prions : que l’Esprit-Saint donne aux bergers la capacité pastorale et le discernement nécessaires pour leur fournir des mesures qui ne laisseront pas seul le peuple fidèle de Dieu. Que le peuple de Dieu se sente accompagné par les pasteurs et le réconfort de la Parole de Dieu, des sacrements et de la prière », a-t-il déclaré avec son parler-vrai légendaire. Juste après qu’il ait prononcé ces mots, le cardinal Angelo De Donatis, Vicaire du Pape pour le diocèse de Rome, a décidé de rouvrir les églises paroissiales – qu’il avait fermées un peu rapidement la veille par décret – afin que les fidèles puissent continuer à aller s’y ressourcer spirituellement… Face à l’épidémie, le recours à Dieu est en effet essentiel et la fermeture des églises m’avait profondément choqué hier. Comme moi, de nombreuses personnes, avant ou après avoir fait leurs courses, vont se recueillir devant le Saint Sacrement pour intercéder en faveur des malades et du personnel soignant.
Mercredi dernier, journée de jeûne dans toute l’Italie, nous nous sommes unis à la prière du Pape François, retransmise depuis la Palais apostolique au Vatican, au cours de laquelle il demanda sa protection à la Sainte Vierge, avant la messe célébrée au sanctuaire romain du Divin Amour. « Oh Marie, nous te faisons confiance, Reine des malades, toi qui a gardé une foi ferme alors qu’au pied de la croix tu partageais la souffrance de Jésus. Sous ta protection, nous nous réfugions, Sainte mère de Dieu. Ne méprise pas les demandes que nous t’adressons, délivre-nous de tout danger, oh glorieuse et bénie Vierge Marie », avons-nous dit notamment avec le Saint-Père, prière que nous répétons chaque soir après la messe diffusée depuis le même sanctuaire.
Le 19 mars, pour la fête de saint Joseph, le Gardien de la Sainte Famille, les évêques italiens nous proposent d’allumer une bougie à nos fenêtres et de prier le chapelet dans les maisons, à 21 heures, méditant les mystères lumineux de la vie du Christ. Comme j’aimerais que les évêques de France aient pareille audace ! Si vous me lisez, n’hésitez pas à le leur signaler, là où vous vivez, d’autant que la crise du coronavirus ne tardera pas à rejoindre dans l’Hexagone le niveau de gravité qu’elle atteint désormais en Italie.
6 Comments
En France on est dedans mais les gens sont sanitairement irresponsables dans leur comportement. mais ça bouge doucement
Bonjour François,
Avec vous depuis lAlsace ou tout se ralentit aussi mais je veux écrire que ce chemin de carême 2020 particulier nous donne une foi ancre en Jessus L Abandonné et avec la Desolata pour fêter le Christ dans sa Gloire.
Je souhaite être informé des publication à venir
Merci pour ce texte si beau
Merci de nous rappeler que notre vraie place est d’être des adorateurs et des intercesseurs devant Dieu. Nous suivrons votre initiative et la relaierons pour le 19 mars. Sainte inspiration !! Lyon va bouger avec son « Merci Marie » bien à elle !!
Les Français réalisent la gravité de la situation enfin. Espérons que nous n’arriverons pas au stade actuel de l’Italie. Prions, prions pour eux, pour la France, pour les politiques du monde entier et très particulièrement pour nos pasteurs. « Viens Esprit Saint, Viens embraser nos cœurs, Viens au secours de nos faiblesses… »??
Impossible coller le texte … Mais j’aimerais bien recevoir vos publications. Merci.