Dieu entend même ceux qui restent silencieux

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Quand les disciples du Christ ont éprouvé un sentiment de découragement, ils sont retournés à la pêche… Je dois dire que c’est un peu mon cas en ce moment, chers lecteurs. Je m’en vais à la pêche, le plus souvent possible, à Santa Marinella, près de Rome, où le Seigneur Jésus me rejoint, dans une prière ininterrompue vécue à l’unisson de l’Esprit Saint, selon la spiritualité hésychaste qu’il est urgent de redécouvrir. L’hésychasme – du grec hèsychia, qui évoque à la fois le silence et la sérénité – est un mouvement spirituel marqué par la répétition du nom de Jésus. La connaisssance de Dieu n’est pas livresque mais intime, intérieure, il s’agit d’une expérience lumineuse qui se vit dans le cœur, au-delà des mots inutiles, loin des grands débats stériles et des opérations de communication à la mode.

Parmi vous certains s’étonnent de mon silence sur ce blog. J’avoue être déconcerté, abasourdi, face à la confusion qui règne dans l’Eglise et dans la société ; de plus il me semble que les paroles ne servent plus à rien car elles sont interprétées, « travesties par des gueux  pour exciter des sots », comme dit si bien Rudyard Kipling dans son célèbre poème sur ce qu’est être un homme.

Les fidèles catholiques sont désorientés. La mission de l’Eglise est-elle de plaire à tous, comme une séductrice ? La sous-morale distillée par les apôtres des bons sentiments devient insoutenable. Face à un double langage désormais insupportable dans lequel se drape une forme dévoyée de discours ecclésiastique, il est temps de rappeler l’Evangile : « Que votre parole soit « oui », si c’est oui, « non », si c’est non. Ce qui est en plus vient du Mauvais » (Matthieu 5, 37).

Dans la société, la crise du Covid-19 permet aux architectes du fameux « monde d’après » de museler les personnes en réduisant au maximum les libertés publiques. Les diktats despotiques sont relayés jusque dans nos églises par les consignes sur l’hygiénisation et la désinfection, au grand désespoir des baptisés qui préfèreraient être soutenus sur le chemin de leur sanctification. Après cette phase d’entraînement général, l’humanité risque d’être mise en esclavage avec son consentement : personne ne pourra acheter ni vendre sans avoir « la marque », c’est-à-dire le nom de la bête ou le nombre de son nom, selon ce que la Bible annonce (Apocalypse 13, 17).

La peur de la maladie est accompagnée de celle du terrorisme, orchestrée après chaque attentat savamment manipulé, pour diaboliser la foi de millions de musulmans au nom d’un  infâme et prétendu « droit au blasphème » fondé sur une liberté devenue folle qui ne respecte rien ni personne. Les récentes déclarations du Pape François à ce sujet ne font bien entendu par la une des journaux, spécialement quand il espère que « sont finis les temps d’un certain laïcisme qui ferme les portes aux autres et surtout à Dieu, parce qu’il est évident qu’une culture ou un système politique qui ne respecte pas l’ouverture à la transcendance, ne respecte pas de façon adéquate la personne humaine » (Lettre pour le 50ème anniversaire des relations diplomatiques entre le Saint-Siège et les institutions européennes).

Saint Jean Paul II, pendant plus d’un quart de siècle, avait essayé de réveiller les racines chrétiennes de l’Europe mais il a prêché dans le désert de l’individualisme. Sainte Bernadette avait raison de dire : « Je ne crains que les mauvais catholiques ». Aujourd’hui les chrétiens occidentaux laissent les églises vides et préfèrent aller le dimanche au supermarché. Une autre religion se profile, qui pourrait bien prendre dans quelques décennies, en Europe, le relais d’un christianisme vidé de sa substance en même temps que d’une laïcité intolérante, desséchée et sans futur.

Que pouvons-nous faire pour recevoir et garder un regard de compassion universelle ? Retirons-nous en nous-mêmes, dans le sanctuaire de notre âme où Dieu demeure, et cultivons la liberté intérieure en puisant à la source inépuisable de notre baptême. Lors de l’attentat commis dans la basilique Notre-Dame de l’Assomption, à Nice, juste avant la fête de tous les saints, j’ai été bouleversé par la photo de l’une des victimes, égorgée, baignant dans son sang, au  pied du bénitier. Je crois fermement que l’humanité nouvelle que Dieu veut rassembler sera sauvée par le sang des martyrs, pas seulement en Chine mais là où nous vivons également. Préparons-nous donc à donner notre vie si nécessaire, le cœur rempli de l’amour que l’Esprit Saint y verse en abondance.

Notre prière fait des miracles sans que nous le sachions. Elle nous offre un nouveau regard sur les êtres et les choses. Adoptons cette  spiritualité hésychaste dont je parlais au début de cette réflexion, en répétant par exemple « Seigneur Jésus Christ, aie pitié de moi ». « Ce n’est pas le lieu qui est à chercher, mais c’est de commencer à se tourner vers Dieu », comme l’expliquait saint Jean Chrysostome. « Même si tu es dans un bain, prie ! Même dans une rue, même dans un lit : où que tu sois, prie ! Tu es le temple de Dieu (1 Co 3, 16), ne cherche pas un lieu ». C’est ainsi que l’Eglise et la société se trouveront régénérées, car Dieu entend même ceux qui restent silencieux…

François Vayne, Toussaint 2020                                                                         

 

2 Comments

  1. Elbet Anne dit :

    Très belles réflexions ! Merci !

  2. Remond dit :

    Oui, Dieu se laisse rejoindre dans chaque lieu de vie, que nous marchions, que nous mangions, que nous dormions Dieu nous accompagne, l Emmanuel Dieu avec nous.
    Merci François pour cette profonde réflexion, et restons des témoins, joyeux de l espérance qui habite en nos cœurs 💞, loin du tumulte de ce monde qui gronde de plus en plus fort

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